Comment paierez-vous demain?
Le monde des paiements subit une métamorphose fondamentale. Des phénomènes émergents comme le smartphone et la tablette prennent une importance croissante. " La Belgique a longtemps été un précurseur en matière de paiements. Nous voulons retrouver ce rôle ", explique Gunter Uytterhoeven, directeur du marketing chez BNP Paribas Fortis. Nous parcourons avec lui les grandes innovations qui sont en préparation.
Nous payons par SMS, nous achetons nos tickets de train et les imprimons à domicile, ou nous faisons lire ce même ticket sur notre GSM ou notre smartphone sur une borne sans contact. Pour résumer : notre smartphone se transforme de plus en plus en porte-monnaie. " Et nous n’en sommes qu’au début ", souligne Gunter Uytterhoeven. Nous nous penchons avec lui sur quatre domaines où l’on note une évolution claire dans le monde des paiements. Tous surfent sur la tendance de l’essor d’Internet et des communications mobiles.
1 | Paiements peer-to-peer
Les paiements P2P renvoient à la possibilité offerte à des individus d’effectuer des paiements directement entre eux. Le grand nom des paiements peer-to-peer est incontestablement PayPal, pour ceux qui veulent payer par e-mail. Le principe est simple : vous ouvrez un compte PayPal et vous y associez une carte de crédit. À partir de ce moment, vous pouvez transférer de l’argent à n’importe quel utilisateur de Paypal, aux quatre coins du globe, par un simple e-mail. En dépit de sa popularité et de ses dix années d’existence, PayPal n’a pas encore conquis le grand public sur les marchés belge et européen.
PayPal est une innovation structurante qui propose un mode de paiement accessible à tous. Mais, pour le consommateur moyen, il n’est pas simple de l’adopter. " En l’absence d’alternatives simples et gratuites, le cash continue à dominer les petits paiements entre individus ", souligne Gunter Uytterhoeven. C’est pourquoi BNP Paribas Fortis a lancé " Easy Transfer ", une forme de paiement peer-to-peer qui permet à un individu de virer de l’argent à n’importe qui en passant par un simple numéro de GSM comme identifiant du bénéficiaire.
2 | Terminaux de paiement mobiles
Dans notre pays, les commerçants ont massivement recours aux terminaux de paiement. Mais ceux-ci sont souvent assez onéreux. De plus, ils sont généralement liés à un point fixe sur le réseau, comme un magasin. Une solution peu pratique pour ceux qui travaillent en déplacement et qui souhaitent eux aussi être payés directement par carte.
" Selon la Banque Centrale Européenne, il manque environ 100.000 terminaux de paiement en Belgique, si on la compare aux pays voisins ", explique Gunter Uytterhoeven. " Alors qu’en proportion, il y a beaucoup d’argent liquide en circulation. De même, la Belgique compte beaucoup plus de distributeurs de cash que ses voisins ", poursuit- il. " Plus encore : chez nous, le nombre de retraits d’espèces via une carte bancaire augmente plus rapidement que le nombre de paiements par carte bancaire dans les magasins. "
Chez BNP Paribas Fortis, la solution de paiement mobile et abordable se compose d’une application mobile installée sur le smartphone du commerçant et d’un petit appareil dans lequel l’acheteur insérera sa carte de débit ou de crédit, et sur lequel il entrera son code secret. Le smartphone du commerçant et l’appareil sont connectés par technologie Bluetooth. " En fait, nousscindons le terminal de paiement traditionnel en deux éléments : le logiciel installé sur le smartphone du commerçant d’une part, et le petit appareil, d’autre part. "
L’appareil fera progressivement son apparition sur le marché à partir de cet été et coûtera environ 125 euros, soit nettement moins que les 800 à 1000 euros que doivent débourser beaucoup de commerçants pour leur terminal de paiement. Avec cette solution, BNP Paribas Fortis vise surtout les commerçants qui enregistrent peu de transations par jour ainsi que des commerçants mobiles comme les marchands ambulants, les jardiniers ou les revendeurs de mazout de chauffage.
À l’instar d’Easy Transfer, cette solution permet d’exécuter un paiement avec n’importe quelle contrepartie. " Nous voulons ainsi lutter contre le phénomène de " l’oeuf et de la poule ". La technologie est accessible à tout le monde, y compris aux clients d’autres banques. Et il n’y a aucun obstacle à l’essor de son utilisation. En matière de paiements, l’avenir réside dans les innovations ouvertes ", affirme Gunter Uytterhoeven.
3 | E-commerce
De nouvelles formes de paiement sont également appelées à se développer dans le domaine du commerce en ligne. " Elles doivent donner un coup de fouet à l’e-commerce en Belgique. Dans notre pays, les ventes en ligne représentent environ 2 à 3% du chiffre d’affaire total du commerce de détail. Chez nos voisins, ce pourcentage atteint 8 à 9%. Une différence énorme. " L’une des raisons de notre retard est que la Belgique ne propose pas encore de solutions de paiement de qualité pour le commerce électronique.
" Les commerçants expliquent qu’en moyenne, 23% des clients décrochent au moment du paiement final, car ils considèrent que la procédure est trop laborieuse. Et c’est d’ailleurs le cas : il est encore plus fastidieux de payer sur Internet que dans un magasin ", reconnaît Gunter Uytterhoeven. BNP Paribas Fortis a lancé une solution d’un nouveau genre, baptisée e-wallet. Il s’agit d’une sorte de portefeuille virtuel (voir p. 18/19) dans lequel la banque regroupe toutes les cartes, qu’il s’agisse de cartes de débit ou de crédit. " Les consommateurs qui achètent sur Internet se voient offrir ce moyen de paiement.
Tous les consommateurs, et donc pas uniquement les clients de BNP Paribas Fortis, y auront accès ", indique Gunter Uytterhoeven. L’application est sûre et conviviale, parce que la banque connaît l’identité de l’acheteur et la transmet au commerçant. " Avec cette innovation, nous souhaitons ramener rapidement le nombre d’acheteurs qui interrompent la transaction au moment du paiement sous la barre des 10%. "
4 | M-commerce
Par m-commerce, on entend le commerce mobile. Il permet d’effectuer ses achats via des appareils mobiles comme les smartphones et les tablettes. Ce marché est en plein essor. L’émergence des applications mobiles est remarquable. " 80% du trafic de données mobiles passe par des applications, alors que la simple utilisation d’Internet représente environ 20% du trafic ", explique Gunter Uytterhoeven.
" Les consommateurs considèrent que les applications sont plus conviviales. " Aujourd’hui, presqu’aucune transaction commerciale n’est effectuée par le biais d’applications. Vous voulez acheter un ticket de train, un hamburger ou une place de cinéma via une application? Pour l’instant, c’est impossible, parce que vous ne pouvez pas payer dans l’application, ni y stocker le ticket, par exemple. " De plus, les commerçants éprouvent parfois des difficultés à obtenir l’identité du client et à garantir la sécurité de la transaction. "
BNP Paribas Fortis proposera bientôt un kit de développement de logiciel API (Application Programming Interface). De quoi s’agit-il? Les commerçants pourront associer leur application mobile à la solution Belgian Mobile Wallet, que BNP Paribas Fortis et Belgacom sont en train de développer conjointement. " Le commerçant met ainsi sa propre application en contact avec le portefeuille virtuel de ses clients ", observe Gunter Uytterhoeven.
" De ce fait, ces derniers disposent d’une offre mobile conviviale, où la gestion de l’identité et la sécurité sont parfaitement organisées. Il est même possible d'intégrer dans la transaction certains éléments comme les bons de réduction et les cartes de fidélité. "
Momentum
Toutes ces innovations sont supposées imprimer un nouvel élan au monde des paiements dans notre pays. " Nous voulons retrouver la situation d’il y a 10 ans. À l’époque, il existait en Belgique une infrastructure très innovante en matière de paiements. " Gunter Uytterhoeven se souvient du développement de solutions et de plates-formes comme Banksys ou Isabel, ou de Vasco, qui a conçu le Digipass.
" Ces dernières années, nous avons perdu ce rôle de leader. Proton n’a pas percé. Le nombre de terminaux de paiement est limité, tout comme l’utilisation de l’e-commerce. Ces inconvénients peuvent également jouer à notre avantage. Nous remarquons que le smartphone et la tablette s’imposent rapidement. Nous devons profiter de ce momentum. " L’évolution des solutions de paiement n’est d’ailleurs pas un phénomène purement national.
Gunter Uytterhoeven: " BNP Paribas Fortis fait partie d’un groupe international. Le poids de ce groupe nous permet de nous associer à des acteurs internationaux de l’envergure d’Ingenico et de Mastercard. L’objectif est que les autres filiales nationales de notre groupe puissent également reprendre et développer nos innovations. Mais, dans un premier temps, notre attention se tourne vers la Belgique. "
Volet juridique
Reste, pour conclure, le volet juridique. Toutes ces innovations en matière de paiements ne se heurtent-elles pas à des implications ou limitations légales ? " Pas nécessairement ", affirme Gunter Uytterhoeven.
" Nous pouvons nous reposer sur le cadre légal existant. Ainsi, la loi sur la vente à distance précise qu’un achat peut être annulé endéans les 14 jours et que le montant de l’achat doit alors être remboursé. Les schémas classiques par carte qui intègrent ces dispositions et que nous utilisons pour les cartes de crédit, sont également d’application pour l’ecommerce et le m-commerce ", dit-il.
Les nouvelles solutions de paiement relèvent également d’autres domaines juridiques, comme celui de l’Internet banking par exemple – dont ressort l’easy-banking – ou la réglementation en matière de PCI (Payment Card Industry), qui protège la sécurité des cartes bancaires. " Jusqu’à présent, ces cadres juridiques couvrent toutes nos innovations. Un détail non négligeable, car nous pouvons ainsi satisfaire tous les besoins correctement. "