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“La neutralité climatique en 2050? Pour moi, c’est un ‘oui’ franc et net!”

Philip Eyckmans (Nyrstar), Catherine Vandenborre (Elia Group), Gunter Huyghe (animateur), Pieter Timmermans (FEB), Pieter Lodewijks (VITO/EnergyVille)

L'énergie est-elle encore abordable pour les entreprises? Notre industrie parviendra-t-elle à atteindre l’objectif “net zéro” fixé par le Green Deal européen? Qui porte quelle responsabilité dans la transition énergétique? Réunis à l’occasion de ce Grand Débat sur l'énergie, représentants du secteur et experts préviennent: “Les entreprises qui partent ne reviennent pas facilement.”

La combinaison d'une énergie coûteuse et d'investissements massifs consentis en vue d'atteindre les objectifs climatiques pèse au bilan d'un nombre croissant d'entreprises. La grande industrie, en particulier, fait face à des coûts élevés. Tout récemment, Nyrstar a suspendu sa production de zinc à Budel, aux Pays-Bas. Le site est en maintenance depuis la mi-janvier.

L'un des plus gros consommateurs d'électricité choisit d'interrompre sa production. Les prix de l'énergie n'avaient-ils pourtant pas régressé ces derniers mois?

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Philip Eyckmans, Energy Manager chez le producteur de zinc Nyrstar: “Les prix de l'énergie ont certes légèrement baissé, mais les tarifs de l’électricité restent nettement plus élevés qu'avant la crise énergétique. En outre, nous opérons sur un marché difficile. Les prix du zinc ont chuté, et le climat industriel aux Pays-Bas est plutôt défavorable. En effet, les coûts de transport de l'électricité y sont nettement plus élevés que dans les pays voisins. Les Pays-Bas ont également subi la perte de la compensation pour les coûts énergétiques indirects. Les opérateurs européens qui produisent de l'électricité à partir de charbon et de gaz doivent acheter des droits d'émission de CO2. Ils répercutent ce coût sur le prix, qui est dès lors nettement plus élevé. L'Europe permet aux États membres de compenser partiellement ce surcoût. De nombreux pays et régions en profitent: La Flandre, la Wallonie, la France et l'Allemagne notamment. Mais plus les Pays-Bas. En raison de la suppression de cette compensation des coûts indirects et de l'augmentation des tarifs, Nyrstar Budel souffre d'un lourd handicap en termes de coûts.”

Le Grand Débat sur l'énergie en 4 citations

Quel sera l'impact de l'arrêt de la production?

Eyckmans: “Nous n'y produisons plus de zinc. Or, il s'agit d'un élément très important pour la transition énergétique. Nous n'avons également plus accès à l'extraction de métaux critiques tels que le germanium et le gallium, qui sont des sous-produits du zinc – des matériaux tout aussi essentiels et qui jouent un rôle-clé dans la production de semi-conducteurs, d'écrans tactiles, de panneaux solaires et de cellules photovoltaïques, entre autres. Des matériaux critiques pour l'Europe, pour le secteur automobile, pour l'industrie de pointe, pour la défense et pour la transition énergétique. Nous avons vu les retombées de la dépendance énergétique en Europe. Je pense que nous souhaitons tous réduire notre dépendance à l'énergie provenant d'autres continents. Nous ne voulons certainement pas que cette dépendance gagne les niveaux supérieurs de la chaîne de valeur. Ce serait très regrettable.”

Combien de temps durera cette pause dans la production?

Eyckmans: “Nous gardons espoir. Environ 500 personnes travaillent sur le site de Budel. Personne n'a été licencié. Nous mettons cette pause à profit pour effectuer des travaux de maintenance et dispenser des formations. L'usine a été fermée de manière très contrôlée, ce qui nous permettra de redémarrer immédiatement dès que les paramètres économiques seront plus favorables. Mais nous n'avons aucune idée de l'échéance.”

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“Les études réalisées en collaboration avec l'industrie nous permettent d'anticiper une augmentation de la consommation d'électricité de 40 à 50% au cours des 10 prochaines années.”

Catherine Vandenborre
CEO ad interim d'Elia Group

Nyrstar gère également des usines en Belgique, à Balen et à Pelt. Le même scénario est-il possible chez nous?

Eyckmans: “Aujourd'hui, la question ne se pose pas. Le climat industriel est plus favorable en Belgique qu'aux Pays-Bas. Mais ce n'est pas exclu, bien sûr. Nyrstar Balen représente environ 1,5% de la consommation totale d'électricité en Belgique. Normalement, 30 à 40% de nos frais d'exploitation sont des frais d'électricité. Si ces coûts énergétiques augmentent, nous ne pourrons pas les répercuter. Le zinc appartient à un marché de matières premières. Si nous augmentons nos prix, du zinc moins cher – et probablement moins bien produit – sera importé d'autres pays européens ou d'Asie. Il est donc essentiel que nos coûts énergétiques demeurent compétitifs.”

Monsieur Timmermans, recevez-vous cet écho d'autres entreprises?

Pieter Timmermans, CEO de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB): “Absolument. Les entreprises confessent leur difficulté à rester compétitives. Dans le passé, les coûts de la main-d'œuvre étaient les principaux responsables; aujourd'hui, ce sont les coûts de l'énergie qui alourdissent la facture globale. Et ce n'est pas sans danger: si une entreprise décide d'arrêter sa production, de l'arrêter ou de la délocaliser, elle ne revient pas facilement. Une fois la porte fermée, c'est souvent définitif. Le Green Deal est important et le tournant énergétique indispensable. Mais si aucun Industrial Deal n'y est associé, nous passerons à côté d'une opportunité. Malheureusement, c'est ce qui se passe actuellement en Europe. L'économie belge est déjà clairement divisée. Le secteur industriel est en difficulté. Celui des services se porte encore bien dans l'ensemble, mais là aussi, les premières failles apparaissent. Quand l'industrie est à la dérive, les services suivent, généralement. L'inverse n’est pas forcément vrai: si nous attirons les services, l'industrie ne suit pas automatiquement.”

Le Grand Débat sur l'énergie - Pieter Timmermans

Qu’espère Nyrstar du pouvoir politique dans ce scénario?

Eyckmans: “Nos exigences sont au nombre de quatre. Premièrement, des coûts de l'électricité compétitifs, notamment grâce à la compensation carbone pendant la transition énergétique, et des coûts de réseau compétitifs. Deuxièmement, des tarifs de réseau qui récompensent une consommation flexible. C'est déjà en partie le cas en Belgique, mais nous pouvons et devons aller plus loin. Troisièmement, un soutien à l'investissement. Dans notre cas, il s'agit très spécifiquement de la gestion de la demande et de la production de minéraux et de métaux critiques. Et quatrièmement, nous avons besoin d'une politique industrielle qui favorise la transition et ancre l'industrie ici.”

Examinons un instant les coûts de l'énergie. Toutes les sources d'énergie ne sont pas aussi chères les unes que les autres. Est-il vrai que les énergies renouvelables sont la forme d'énergie la moins chère?

Pieter Lodewijks, expert en énergie chez VITO/EnergyVille: “Entre 2010 et 2022, le coût des panneaux solaires a chuté d'environ 90%. Celui de la production éolienne terrestre a reculé de 70%, et celui de la production offshore de 60%. Cette évolution est le résultat d'effets d'apprentissage, de politiques de promotion des énergies renouvelables et de l'installation d'une vaste capacité de production. Par conséquent, l'éolien terrestre est désormais l'un des moyens les plus efficaces de produire de l'électricité. Ceci étant dit, les énergies renouvelables doivent toujours être replacées dans leur contexte. Les enjeux ne se limitent pas au coût d'un panneau solaire ou d'une éolienne. La flexibilité et des capacités de transmission sont nécessaires pour acheminer l'électricité jusqu'aux utilisateurs finaux. Mais même dans ce cas, les énergies renouvelables sont extrêmement performantes et moins chères que la plupart des autres alternatives.”

“Nous perdons en influence au niveau européen parce que nous ne parvenons pas, en tant que pays, à définir un plan énergétique cohérent.”

Pieter Timmermans
CEO de la FEB

En va-t-il de même pour l'énergie éolienne en mer?

Lodewijks: “L'éolien offshore a accompli des progrès considérables. Construire en mer est bien sûr plus complexe que sur terre. L'année dernière a par ailleurs été marquée par une augmentation du coût des matériaux, un marché des semi-conducteurs dans la tourmente et une hausse du coût de la main-d'œuvre nécessaire à l'installation des turbines. En outre, les taux d'intérêt ont augmenté. Par conséquent, les technologies qui impliquent d'importants investissements peinent à progresser – le constat est identique sur le marché des éoliennes offshore. Pour autant, nous pensons qu'il s'agit d'un phénomène temporaire. Nous prévoyons que la technologie éolienne en mer opérera une percée considérable à court terme et deviendra l'un des principaux vecteurs de la transition énergétique en Europe.”

L'année dernière, les petites réacteurs nucléaires modulaires (SMR) ont beaucoup fait parler d’eux. Doit-on y voir une solution pour produire de l'électricité moins chère?

Catherine Vandenborre, CEO ad interim d’Elia Group: “On en parle beaucoup, mais cette technologie n'est pas mature. En sortie d’usine, ces petits réacteurs pourraient être installés sur un site assez rapidement. Avec leurs 10 à 300 mégawatts, ils produisent de plus petits volumes d'électricité que la génération actuelle de centrales nucléaires – environ 1.000 mégawatts. On peut espérer que les prix de ces SMR pourront diminuer grâce à des économies d'échelle. Cependant, les prévisions actuelles les plus optimistes tablent sur un coût inférieur à celui de l'énergie nucléaire actuelle, mais supérieur à celui du gaz conventionnel et des énergies renouvelables, éolienne et solaire.”

Le Grand Débat sur l'énergie - Catherine Vandenborre

Timmermans: “Il faut aussi considérer la dimension géopolitique. Nous voulons être indépendants. Ce qui signifie que nous devons investir dans toutes les formes d'énergie possibles: éolienne, solaire et nucléaire, mais aussi dans les biocarburants et les e-carburants. Mais essayez d'installer une éolienne en Flandre… Placez-la en mer du Nord: no problem. Pourtant, le câble doit ensuite être ramené à terre, et les procédures pour garantir le transport de l'énergie sont contraignantes. En termes d'énergie, nous devons parvenir à un parfait équilibre entre le prix, la sécurité d'approvisionnement et l'écologie. Cet objectif est atteignable, mais nous aurions tort de nous laisser aveugler par les sources d'énergie alternatives. Nous avons besoin d'un mix varié, et pour l'obtenir, il faudra briser les tabous.”

En d'autres termes, le mix énergétique idéal comporte certains avantages et inconvénients. Quels défis cela représente-t-il pour le réseau d'Elia?

Vandenborre: “Les études réalisées en collaboration avec l'industrie nous permettent d'anticiper une augmentation de la consommation d'électricité de 40 à 50% au cours des 10 prochaines années. Cela s'explique en partie par le fait qu'un certain nombre de processus industriels utilisant du gaz ou d'autres sources d'énergie seront électrifiés. Mais aussi parce que les voitures électriques et les pompes à chaleur gagnent du terrain. En tant que gestionnaire de réseau, nous devons dès maintenant préparer notre infrastructure à cette croissance de la demande d'électricité, afin de garantir le transport efficace de cette énergie. Nous pourrons ainsi réduire notre dépendance aux combustibles fossiles et aux régimes moins stables. Dans le même temps, les interconnexions avec la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni et l'Europe du Sud représentent un potentiel considérable pour notre pays. Ces interconnexions donnent accès à de l'énergie éolienne et solaire bon marché. Un réseau doit être développé à cet effet. Il convient de s'y atteler dès à présent, car de telles réalisations requièrent aisément une dizaine d'années.”

“D'après nos modèles, la combinaison énergétique la plus rentable implique le quadruplement des panneaux photovoltaïques d'ici à 2030.”

Pieter Lodewijks
expert en énergie chez VITO/EnergyVille

Ces projets sont-ils en bonne voie?

Vandenborre: “Absolument. Dans certains pays, le gestionnaire de réseau ne parvient pas à répondre à la demande d'électricité. Aux Pays-Bas, par exemple, les investissements ont été insuffisants par rapport à l'augmentation de la demande d'électricité. Par conséquent, de nombreuses entreprises qui souhaitent se développer ne peuvent pas obtenir le raccordement renforcé au réseau. C'est catastrophique. Pour éviter cet écueil, nous mettons tout en œuvre afin de bien planifier et construire. Au cours des cinq années à venir, Elia investira 9,4 milliards d'euros en Belgique. Mais nous sommes également actifs en Allemagne et aux États-Unis. Nous avons actuellement un programme d'investissement de 30,1 milliards d'euros.”

Ces investissements seront-ils en fin de compte répercutés sur vos clients?

Vandenborre: “Nos activités régulées entrent en effet en considération dans la facture finale des clients industriels et résidentiels. Le transport ne représente qu'un faible pourcentage de la facture totale. Tous nos investissements font l'objet d'une analyse coûts-bénéfices. Et nous n'investissons qu'à condition que l'impact soit positif sur la facture totale du client. En intégrant au réseau des sources d'électricité moins coûteuses, telles que le solaire et l'éolien, nous pouvons accroître la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique global. Et même si les coûts de transport augmentent dans ce scénario, la facture finale du client s'allège.”

Quel est le mix énergétique idéal pour Nyrstar?

Eyckmans: “Nous plaçons l'accent sur la flexibilité de notre consommation d'énergie et souhaitons aligner davantage notre production sur l'offre d'énergie éolienne et solaire. Nous croyons donc fermement aux énergies renouvelables, mais nous sommes aussi conscients que, plus ces sources d'énergie progressent, plus les coûts du système seront élevés pour pouvoir maximiser leur utilisation. Chaque technologie a ses avantages et ses inconvénients. Il est impossible d’exclure une technologie: elles sont complémentaires. Un mix énergétique optimal est indispensable pour que l'énergie reste abordable.”

Le Grand Débat sur l'énergie - Philip Eyckmans

Le Green Deal de la Commission européenne vise à faire de l'Europe le premier continent climatiquement neutre d'ici à 2050. Atteindrons-nous cet objectif ambitieux?

Lodewijks: “Pour 2050, j'ose répondre par un ‘oui’ franc et net, même s'il faudra peut-être attendre 2055. Je préfère ne pas rester fixé sur 2050. Nous savons que les 10 derniers pour cent qui nous séparent du ‘net zéro’ seront les plus difficiles à éliminer. Nous avons déjà une vision claire des technologies indispensables pour y parvenir, ainsi que des mesures à prendre par les divers secteurs. L'électrification est cruciale dans ce cadre. Il existe néanmoins de grandes variations entre les secteurs. Celui de l'immobilier dispose des technologies ad hoc pour tendre vers des émissions nulles. Mais il n'y parviendra que si des milliers d'acteurs individuels sont mobilisés pour réaliser les investissements nécessaires. Des politiques de soutien et de motivation sont essentielles à cet égard. La situation est différente pour les entreprises. Les coûts d'investissement totaux pour des émissions nulles y sont plus faibles que dans le secteur immobilier, mais bon nombre des technologies en jeu sont encore au stade de la recherche. Une accélération ou une mise à l'échelle au niveau industriel est incontournable. Il y a du pain sur la planche!”

Timmermans: “Les efforts à consentir en matière de recherche et développement sont encore considérables. Certains processus industriels exigent des températures très élevées qui ne peuvent être atteintes, ou pas suffisamment, avec de l'électricité. Nous avons donc besoin d'autres sources d'énergie pour rendre les processus industriels durables. Si nous voulons être un acteur international sur le marché de l'énergie, il faudra absolument soutenir la recherche et le développement. Nous avons des centres technologiques performants, d'excellentes universités. Il faudra cultiver cela. C'est aussi une forme d'investissement dans la transition énergétique.”

Nyrstar utilise 50% d'électricité verte en Belgique. Quelles sont vos ambitions dans ce domaine?

Eyckmans: “En fait, nous sommes déjà une usine du futur. Nous sommes presque entièrement électrifiés. Nous récupérons énormément de chaleur et nos émissions directes de CO2 sont très faibles. Nos sites sont équipés de fermes solaires, d'éoliennes et d'une méga-batterie. Notre processus de production est flexible, et nous prévoyons de le rendre encore plus flexible, en fonction de l'énergie éolienne et solaire disponible. Nous aidons ainsi Elia et les producteurs d'énergie éolienne et solaire à maintenir l'équilibre du réseau. Lorsque le soleil et le vent sont abondants, les parcs solaires et éoliens doivent parfois être mis hors service. Si nous consommons davantage à ces moments-là, cette interruption sera moins souvent nécessaire. C'est à la fois intéressant pour les émissions de CO2 et pour le prix. Si nous réduisons notre demande lorsque l'offre est faible, les prix de l'énergie baisseront pour tous les consommateurs belges.”

“Si nous voulons réduire la dépendance de l'Europe aux autres continents, tout le monde doit apporter sa pierre à l'édifice, et une politique industrielle solide est nécessaire.”

Philip Eyckmans
Energy Manager chez Nyrstar

Consommer moins en période d'offre réduite: quel est le rôle d'Elia dans ce cadre?

Vandenborre: “Adapter les processus de production de manière flexible à l'offre d'électricité est un moyen pour l'industrie de maîtriser les coûts de l'électricité. Nyrstar y parvient à merveille. De nombreuses entreprises ne sont pas suffisamment conscientes du potentiel de la consommation flexible. Elia veut les y aider. Il en va de même pour les ménages qui optimisent leur consommation avec des voitures électriques et des pompes à chaleur. Ils peuvent économiser de l'argent en maximisant leur consommation lorsque l'électricité est la moins chère. La technologie existe, mais plusieurs obstacles demeurent, comme l'absence d'une plateforme de données centrale. Elia est un pionnier dans ce domaine.”

La division des compétences en matière d'énergie et de climat n'est-elle pas un handicap pour nos entreprises? Devrait-il y avoir un ministère unique de l'Énergie et du Climat?

Timmermans: “Il est absolument nécessaire d'améliorer la coordination et de conclure des accords communs. Nous perdons en influence au niveau européen parce que, en tant que pays, nous ne parvenons pas à élaborer un plan énergétique cohérent. Mes collègues étrangers s'attendent systématiquement à ce que la Belgique reste à l'écart, et donc ne tiennent même plus compte de notre avis. Je trouve cela particulièrement regrettable. Nous sommes un petit pays, mais le réseau est performant. Nous l'avons vu récemment avec Ventilus. De plus, en Flandre, l'installation d'une nouvelle éolienne est extrêmement complexe, du fait des permis, difficiles à obtenir. Le réflexe ‘Not In My Backyard’ est encore prégnant dans le nord du pays, alors qu'en Wallonie, l'espace disponible est considérable. Au sens propre comme au sens figuré, le champ est ouvert pour davantage de coopération. Politiquement, cela implique une refédéralisation. Pour certains, cet objectif est utopique; nous pourrions dès lors nous contenter au moins d'une forme renforcée de coordination, reposant sur un mécanisme où quelqu'un peut décider en dernier ressort. C'est ce dont nous avons besoin.”

Le Grand Débat sur l'énergie - Pieter Lodewijks

Et que faut-il faire pour que la transition énergétique soit réalisable pour l'industrie?

Vandenborre: “Trois choses. Primo, nous devons investir suffisamment dans l'expansion de notre infrastructure à haute tension. De cette manière, nous pourrons obtenir une énergie renouvelable bon marché là où elle est produite. Cette mesure assoirait l'indépendance de l'Europe et la compétitivité de nos entreprises, en soutenant la stabilité des prix. Secundo, nous devons encourager la consommation flexible. Tertio, il convient de consolider la chaîne d'approvisionnement. La transition énergétique s'opère chez nos voisins mais aussi à l'échelle mondiale. Nous constatons une pénurie imminente de câbles et d'autres équipements. La capacité de production en Europe doit dès lors être accrue, ce qui renforcera notre position sur le marché et créera des emplois.”

Tout le monde est en faveur du progrès, mais personne ne veut d'une ligne à haute tension ou d'une éolienne dans son jardin. De même, personne ne consent à trop délier les cordons de la bourse pour cette transition énergétique. Quelle est la meilleure façon de concilier ces impératifs?

Lodewijks: “D'abord, la situation doit être nuancée. Le syndrome 'Not In My Backyard’ est effectivement un sujet, mais dans l'ensemble, la situation n'est pas alarmante en Belgique. De quoi avons-nous besoin? Tout d'abord, d'un message clair: tous les consommateurs souhaitent pouvoir consommer de l'électricité à tout moment. De quoi a-t-on besoin pour cela? D'une production, bien sûr. Selon nos modèles, le mix énergétique le plus rentable exige le quadruplement des panneaux photovoltaïques et le doublement des éoliennes terrestres et offshore d'ici à 2030. En outre, il faut veiller à ce que les citoyens ne subissent pas seulement les aspects négatifs, mais bénéficient aussi des effets positifs de la transition énergétique. Par exemple en travaillant avec des coopératives. On peut installer des éoliennes et, par l'intermédiaire d'une coopérative, laisser les citoyens partager les bénéfices ainsi produits. Une politique stable est également nécessaire. Nous plaidons depuis longtemps pour un transfert de taxe de l'électricité vers le gaz. Enfin, la ‘famille moyenne’ n'existe pas. La Belgique a besoin de sur-mesure. Par exemple, les familles qui ont des difficultés financières pourraient bénéficier d'un soutien supplémentaire pour aborder la transition énergétique.”

Voir le débat complet.

Quel message aimeriez-vous faire passer?

Vandenborre: “Nous sommes à un tournant décisif. Nous avons besoin de davantage d'énergie renouvelable et d'une énergie moins chère. Nous devons donc travailler ensemble et de manière coordonnée sur un mix énergétique différent.”

Eyckmans: “Nous allons en effet devoir collaborer. Chacun doit faire sa part, et une politique industrielle solide est indispensable. On ne peut pas simplement établir une liste de tâches et exclure les opérateurs qui n'auraient pas la possibilité de les réaliser. Cela ne marchera pas comme ça.”

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