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Série d'été «Le Déluge» | 2/3: Noé, un écologiste avant l'heure?

"Noah's Ark", de l'artiste haïtien Andre Normil (1967). ©Album

Hormis le mythe de l’Atlantide, le récit biblique du Déluge est certainement le plus connu, car associé au célèbre récit de l’Arche de Noé, évoqué dans la Genèse. Dieu, furieux de la méchanceté et de la perversité de l'humanité, décide de purifier la Terre en provoquant une immense inondation sur toute la surface de la Terre.

"La fin de toute chair est arrivée, je l'ai décidé, car la Terre est pleine de violence à cause des hommes et je vais les faire disparaître de la Terre". Dans un moment de colère et d'exaspération, Dieu, pourtant présenté comme bon, décide donc de faire table rase en prenant une décision terrible: éliminer l'humanité pour repartir à zéro.

Néanmoins, il épargne un homme: Noé. Le considérant comme un homme juste, il lui annonce l'imminence de la catastrophe et lui ordonne de construire une arche pour se protéger, lui et sa famille. Sur son arche, il devra aussi embarquer un couple de chaque espèce animale. Noé est donc l’ancêtre de toute l’humanité post-déluge, un nouvel Adam.

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La mention la plus ancienne du Déluge connue à ce jour se trouve dans des textes sumériens datant de la fin du troisième millénaire avant J.-C.

Un mythe adapté de légendes mésopotamiennes

Le mythe du Déluge, tel que présenté dans la Bible, est en fait une adaptation tardive de légendes mésopotamiennes remontant à la période sumérienne, comme l'explique l'historien Jacques Gossart.

La mention la plus ancienne du Déluge connue à ce jour se trouve dans des textes sumériens datant de la fin du troisième millénaire avant J.-C. On retouve aussi des versions de ce récit dans les traditions babyloniennes et assyriennes, dans les épopées d’Atrahasis et de Gilgamesh, qui racontent comment les dieux ont provoqué un déluge pour engloutir une humanité prenant un peu trop de place.

Bien qu’ils s’agissent de mythes et de légendes, ces histoires s’ancrent dans une angoisse bien réelle pour les Mésopotamiens à l'époque: les deux grands fleuves de la région, le Tigre et l’Euphrate, connaissaient des crues souvent dévastatrices. Malgré certaines différences, il existe de nombreuses similitudes entre tous ses récits, comme l’explique encore Jacques Gossart. Par exemple, si les juifs parlent d’"arche", les sumériens évoquent quant à eux un "grand vaisseau" tandis que, dans l’épopée de Gilgamesh, il s’agit d’"un bateau en forme de cube", une espèce d’univers en forme réduite.

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À travers ce mythe, c'est aussi et surtout un monde fragile qui nous est présenté, soumis à des événements climatiques imprévisibles: un monde qui peut basculer du jour au lendemain dans le néant.

L'Arche de Noé, mythe ou réalité?

Le récit de l’Arche de Noé est peu crédible d’un point de vue scientifique. Une telle inondation aurait-elle pu réellement se produire C'est fort peu probable, selon les scientifiques. Cependant, ce récit a pu être inspiré par un événement réel, mais probablement survenu à un niveau local et non mondial. Le récit du Déluge présente en outre de nombreuses incohérences flagrantes, à commencer par le personnage de Noé lui-même qui aurait vécu 950 ans, selon la Genèse...

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Comme dans le cas de l'Atlantide, ce récit serait finalement davantage une allégorie qu'un événement ayant réellement eu lieu. Le récit biblique présente un Dieu intransigeant, colérique, et dans le même temps en proie au doute quant à sa création. Il regrette à la fois d’avoir créé une humanité aussi mauvaise et d’avoir voulu la supprimer. Il promet finalement de ne plus jamais recourir à une telle puissance destructrice, établissant ainsi une espèce de nouvelle alliance avec les hommes, en reconnaissant l'imperfection de ces derniers.

À travers ce mythe, c'est aussi et surtout un monde fragile qui nous est présenté, soumis à des événements climatiques imprévisibles: un monde qui peut basculer du jour au lendemain dans le néant. Si Dieu promet de ne plus provoquer de déluge et s'affirme comme garant du salut de la Terre, cela ne dédouane pas l’homme d’être également responsable de l’avenir de la planète.

On pourrait d’ailleurs voir dans le personnage de Noé, une des premières figures de la sauvegarde de la biodiversité et la préservation des espèces, voire de la transition vers un autre mode de vie, une autre relation avec le vivant dans son ensemble. La tâche, après le déluge, est bien de rendre la terre habitable pour tous les êtres vivants. Pour autant, à l’heure de la crise climatique et en écho au récit de Noé, la question se pose: l’être humain ne risque-t-il pas de provoquer lui-même la catastrophe suite à son action destructrice sur la Terre? Comment dès lors envisager, dans le contexte biblique, la réaction divine?

Série d'été"Le Déluge"

La crise climatique et son alternance d’épisodes extrêmes ont ravivé la peur archaïque d’une vengeance divine. Dieu, en colère contre sa créature présomptueuse et imparfaite, a décidé de la supprimer avant de tout recommencer. Derrière la figure du Déluge, il y a l'idée de la table rase. Toutes les grandes civilisations, de Babylone aux Grecs anciens, ont exploré ce mythe du Déluge, qui a alimenté nos imaginaires jusqu’à aujourd’hui. Et si, dans le contexte particulier de la crise climatique, le grand renouvellement était lui-même devenu impossible? 

1/3. L'histoire de l'Atlantide
2/3. Noé et la version biblique du Déluge
3/3. Le thème du Déluge dans d'autres cultures

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