Le débat entre Biden et Trump tourne au cauchemar pour les démocrates
Joe Biden a livré une très mauvaise performance face à Donald Trump, lors du premier débat entre les deux candidats à la présidentielle. Le Parti démocrate doit-il lui trouver un remplaçant?
Joe Biden et Donald Trump se sont affrontés ce jeudi lors d'un débat organisé par CNN. L'exercice présentait la particularité de se tenir avant même que les deux candidats à l'élection présidentielle de novembre soient officialisés par leur parti respectif, lors des traditionnelles conventions, à la mi-juillet pour le Parti républicain et en août pour les démocrates.
Il se disait que le président Biden, 81 ans, s'était bien préparé, s'entraînant à répondre à son avocat qui jouait le rôle de Trump. Mais ce jeudi soir, le président actuel des États-Unis n'a pas assuré. Et l'élection présidentielle américaine 2024 vit sans doute un tournant.
Le fond, mais pas la forme
Le contraste entre les deux hommes a claqué aux yeux de l'Amérique.
Sur le fond, Joe Biden s'est pourtant montré plutôt sensé. Mais, la voix enrouée, il a bloqué sur certains mots, n'a souvent pu achever ses phrases, rendant certains propos incompréhensibles. Quand il n'avait pas la parole, il a parfois paru hagard. Était-il enrhumé, comme l'ont affirmé deux représentants de la Maison-Blanche?
Ce débat a tourné en tout cas au cauchemar pour le candidat démocrate, qui était bien loin de la vigueur déployée en février lors de son flamboyant discours sur l'état de l'Union.
Le républicain Trump, 78 ans, est, lui, resté fidèle à lui-même. Hargneux, énergique, vindicatif et menteur. Le contraste entre les deux hommes, l'un reflétant le vieil homme qu'il est alors que son adversaire regorge de dynamisme, a claqué aux yeux de l'Amérique.
"On savait que Joe Biden ne serait pas excellent, mais il s'est avéré très, très mauvais."
Biden doit-il se retirer?
Les premiers sondages "flash" ont directement montré que le démocrate n'avait pas convaincu.
"On savait que Joe Biden ne serait pas excellent, mais il s'est avéré très, très mauvais", résume Serge Jaumain, professeur d'Histoire contemporaine à l'ULB. Sa performance fut si piètre qu'on entend, jusque dans son camp, des appels à un retrait de sa candidature à la présidentielle.
"Chez les démocrates, on n'imaginait pas que Biden pourrait se retirer, à moins d'un problème de santé. Mais les perspectives ont changé, et c'est très problématique", pointe Serge Jaumain.
Plongée dans l'inconnu
Biden, face aux critiques, prendra-t-il la décision de céder sa place de candidat à la présidentielle à un autre démocrate? Et qui pourrait le remplacer? Il n'y a pas de personne toute désignée pour reprendre une telle mission. Et aucune personnalité démocrate ne s'impose.
Il y a bien sûr Kamala Harris, actuelle vice-présidente et colistière de Biden. Mais celle-ci n'a pas la popularité de son patron et les démocrates n'avaient pas choisi d'en faire une adjointe de pointe. Une stratégie qui pourrait leur coûter cher.
D'autres candidats sont déjà cités par la presse américaine. Notamment Gavin Newsom, qui est gouverneur de Californie. Mais Kamala Harris vient aussi de cet État, ce qui rend impossible un ticket constitué des deux noms. La gouverneure du Michigan, Gretchen Whitmer, est aussi envisagée, tout comme le gouverneur de l’Illinois, J.B. Pritzker.
"La suite est un grand point d'interrogation: les démocrates doivent envisager des scénarios qu'ils ne voulaient pas imaginer et auxquels personne n'est préparé."
Panique chez les démocrates
Un éventuel retrait de la candidature de Joe Biden devrait être annoncé rapidement pour que le remplaçant puisse convaincre les électeurs indécis; il ne reste que quatre gros mois. Et aussi pour éviter que le parti ne se déchire publiquement. Vite, mais pas trop vite, parce que les modalités d'un tel revirement sont encore à déterminer.
Le plus simple serait que Biden se retire de lui-même. S'il ne le fait pas, il sera compliqué d'effacer poliment la candidature de cet homme qui joue un rôle rassembleur au sein de son parti et qui a quand même rallié 99% des délégués pour la convention. Ceux-là ont pour mission de voter pour lui.
Aujourd'hui, c'est donc la panique dans le camp démocrate. Certes, Trump le républicain n'a guère convaincu avec ses mensonges, ses incohérences et le flou sur son programme. Mais Biden non plus n'a pas gagné l'intérêt des Américains indécis. Bien pire, il risque bien de perdre des électeurs qui lui étaient voués. Ceux-là pourraient bouder le scrutin.
"Les pressions vont être très fortes. La suite est un grand point d'interrogation: les démocrates doivent envisager des scénarios qu'ils ne voulaient pas imaginer et auxquels personne n'est préparé", constate Serge Jaumain.
Le débat fini, Joe Biden est directement reparti en campagne, direction la Caroline du Nord, puis New York. Sa colistière Kamala Harris est, elle, allée prêcher la parole démocrate dans le Nevada, un de ces swing states qui détermineront le vainqueur de l'élection de novembre.
Un second débat entre Biden et Trump est prévu en septembre, sur la chaîne ABC. Ces deux hommes-là seront-ils au rendez-vous?