Un premier contact Trump/Merkel délicat, avec des divergences flagrantes
Le président américain Donald Trump et la chancelière allemande Angela Merkel ont noué le contact vendredi à la Maison Blanche, mais la tension était palpable et les divergences évidentes, du libre-échange à l'immigration.
Grand jour à Washington, avec le premier tête-à-tête entre Trump et Merkel. L'heure était venue de faire connaissance pour cet homme et cette femme au parcours, au style et aux choix politiques radicalement différents. Les deux dirigeants se sont rencontrés à la Maison blanche pour la première fois, avec au menu de leur conversation la question des futures relations transatlantiques.
Le duo a notamment parlé de l'Otan. S'exprimant aux côtés de la chancelière allemande, le président américain s'est félicité de savoir que l'Allemagne allait augmenter ses dépenses en matière de défense "jusqu'à atteindre 2% du PIB".
Ce n'est un secret pour personne, Donald Trump souhaite aussi voir les Européens contribuer davantage au budget de l'Alliance atlantique, une position qu'Angela Merkel a dit comprendre.
L'immigration, pomme de discorde
"Je ne suis pas un isolationniste, je suis un partisan du libre-échange mais aussi du commerce équitable, et notre libre-échange a conduit à beaucoup de mauvaises choses en termes de dette et de déficits."
L'Europe a les yeux braqués sur ce tête-à-tête pour voir jusqu'où (et sur quel ton) la chancelière allemande, figure centrale de l'Union européenne, se démarquera du nouveau locataire de la Maison Blanche. Après un échange dans le Bureau ovale, les deux dirigeants sont apparus très souriant devant la presse. Des sourires de façade.
Même si les deux dirigeants ont soigneusement évité les critiques directes, c'est sur l'immigration que leurs divergences de vue étaient le plus criantes. L'immigration est "un privilège, pas un droit", a lancé M. Trump. "La sécurité de nos citoyens doit toujours passer en premier", a-t-il martelé lors cette conférence de presse d'un peu moins d'une demi-heure scrutée avec attention des deux côtés de l'Atlantique.
Le sujet est sensible: mi-janvier, Trump avait qualifié de "catastrophique" la décision de Merkel d'ouvrir son pays à des centaines de milliers de demandeurs d'asile en 2015 et 2016. De son côté, la chancelière a ouvertement critiqué le décret migratoire du président américain.
Se parler directement plutôt que par médias interposés
Le président américain Donald Trump a affirmé qu'il n'était "pas isolationniste" en matière de commerce mais partisan d'un commerce "équitable". "Je ne suis pas un isolationniste, je suis un partisan du libre-échange mais aussi du commerce équitable, et notre libre-échange a conduit à beaucoup de mauvaises choses" en termes de dette et de déficits, a déclaré le dirigeant américain lors de la traditionnelle conférence de presse commune qui s'est tenue peu avant 19 heures, heure belge.
Mais les déclarations tonitruantes, parfois contradictoires, du président américain au cours des semaines écoulées donnent une coloration particulière à ce premier tête-à-tête.
Martelant sa conviction que les Etats-Unis avaient été les grands perdants de accords commerciaux des décennies écoulées, l'homme d'affaires septuagénaire a mis en avant sa volonté de négocier des textes qui ne mènent pas "à des fermetures d'usines" sur le sol américain. Si les critiques américaines sur l'excédent commercial allemand ne sont pas nouvelles, l'administration Trump a opté pour un ton nettement plus agressif que les précédentes sur ce thème. Ironisant sur "les négociateurs allemands" qui ont longtemps fait "un bien meilleur travail" que leurs homologues américains, Donald Trump a assuré que ce temps était révolu.
Angela Merkel a reconnu qu'il était préférable de se parler directement plutôt que par médias interposés, mais n'a pas caché non plus l'existence de nombreux points de désaccord. Appelant de ses voeux une reprise des négociations, lancées en 2013, sur l'accord de libre-échange transatlantique TTIP, elle a souligné combien il pouvait être bénéfique aux Etats-Unis comme à l'UE. "Je crois que la mondialisation doit être façonnée avec un esprit ouvert", a-t-elle lancé, au moment où la nouvelle administration américaine articule son action autour d'un seul slogan: "L'Amérique d'abord".
Personnage central d'une Europe en plein doute, Mme Merkel, qui vise un quatrième mandat lors des élections allemandes de septembre, a pris soin de faire l'éloge de l'intégration européenne, soulignant combien le "succès des Allemands" était étroitement liée à cette dernière. "C'est quelque chose dont je suis profondément convaincue", a-t-elle insisté à l'attention du président républicain qui a, au cours des mois écoulés, loué le "merveilleux" Brexit ou encore prédit tout sourire que d'autres pays allaient quitter l'Union prochainement.
Quand Trump tente de faire rire Merkel
Sur la fin d'une conférence de presse sans la moindre trace de complicité, le président américain a tenté de plaisanter avec la chancelière allemande, affirmant qu'en matière de mise sur écoute par la précédente administration, il avait peut-être "quelque chose en commun" avec elle.
Donald Trump a accusé, dans une série de tweets et sans avancer la moindre preuve, son prédécesseur Barack Obama de l'avoir mis sur écoute. En 2013, l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden avait révélé que le téléphone portable d'Angela Merkel avait été mis sur écoute par l'agence de renseignement américaine.
Angela Merkel n'a pas ri.
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