Paul Magnette n'aime peut-être pas les entreprises
Paul Magnette n’aime peut-être pas les entreprises autant que Manuel Valls, mais le premier wallon aime les entrepreneurs et il sait qu’il ne peut plus compter sur la fonction publique pour sauver l’emploi.
La Cigale ayant chanté tout l’été Se trouva fort dépourvue Quand la bise fut venue. Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. Elle alla crier famine…
Vous connaissez la suite. Elle alla frapper à la porte de sa voisine la fourmi. Le parallèle entre la fable de Jean de la Fontaine et la Wallonie est tentant. Oui mais à la différence que tôt ou tard, au gré de l’évolution du paysage institutionnel belge, la Wallonie devra assumer seule son autonomie fiscale. La loi spéciale de financement l’y amène et les derniers transferts de compétences qui lui donnent l’autorité en matière d’allocations familiales la rendent déjà plus que jamais responsable de ses finances. Reste à épurer les comptes et à digérer ces nouvelles compétences. Rien que du costaud!
Bon, en ces jours de fêtes de la Wallonie, inutile d’aller demander à un dirigeant wallon dans quelles dépenses il va aller couper. Il ne le fera pas. On ne veut évidemment pas parler des choses qui fâchent. En vrai, depuis sa mise en place cet été, le nouveau gouvernement a évité de faire des vagues.
Dans sa nouvelle posture de ministre-président, le socialiste Paul Magnette ne pourra pas longtemps se retrancher derrière des slogans comme celui qui est de dire qu’il n’y aura pas de nouvelles taxes. Un discours vérité avec les citoyens s’impose si l’autorité veut mobiliser l’ensemble des Wallons autour du redressement de leur région.
L’échéance budgétaire des 2 et 3 octobre devrait l’y aider. Ce rendez-vous risque d’ailleurs de sonner le clairon et le début de la chasse aux économies.
Un peu partout.
Prenons deux chiffres… Pour 2014: le gouvernement wallon est supposé trouver 500 millions d’euros. Un tour de force quasiment impossible à trois mois de la fin de l’année. La Région s’apprête donc à inscrire sur ses tablettes un déficit de 500 millions d’euros. Ça, c’est pour l’ajustement 2014. Un simple échauffement. Pour son budget 2015, l’exécutif sait déjà qu’il doit mettre la main sur 650 millions d’économies. Et il y a fort à parier que la facture sera tout autant douloureuse l’année qui suit.
Paul Magnette aime les entrepreneurs. Il sait que le salut de la Wallonie passe par un pacte avec les entreprises.
Derrière ces chiffres, le PS et le cdH aux affaires à Namur sont jusqu’ici restés discrets sur la méthode à utiliser pour combler les trous. Tout juste ont-ils promis de ne plus lever de nouvelles taxes. OK mais après? Quelques rustines et un tour de passe-passe comptable ne suffiront plus. Il est tout autant difficile de croire que les rabotages des budgets du Forem, du TEC ou d’autres organismes publics ou même le non-remplacement des départs de quatre fonctionnaires sur cinq n’auront pas d’impact sur les citoyens.
Oui, on y verra plus clair après le conclave budgétaire d’octobre. La partie s’annonce difficile d’autant que les caciques wallons du PS refusent de parler d’austérité.
Le contexte est délicat car l’exercice doit s’opérer sans freiner la croissance. Le problème? La Wallonie ne pourra pas compter cette fois-ci sur l’emploi public et le non-marchand pour la sauver et maintenir son tempo. Avec les nouvelles règles européennes qui imposent à la Région de requalifier une série d’organismes dans son périmètre comptable, l’emploi public ne sera plus la bouée de secours comme ce fut trop souvent le cas par le passé. La nouvelle comptabilité européenne oblige même la Wallonie à lisser ses investissements: ponts, casernes de pompiers, routes,... Les chantiers vont devoir attendre. Les communes wallonnes, déjà aux prises avec de nouvelles règles en matière de pension, sont dans le même panier.
À défaut de ne plus pouvoir compter sur l’emploi public pour venir au secours de l’emploi, la Wallonie doit se muer en état stratège. Elle n’a pas le choix. Les dirigeants wallons en sont conscients. Les 5 pôles de compétitivité vont dans la bonne direction. Et le fait que les budgets du plan Marshall semblent épargnés pour l’instant par la rigueur budgétaire est un signal fort. Il faut cependant accélérer le mouvement de redéploiement. Dans son interview accordée cette semaine à plusieurs journaux, Paul Magnette en est bien conscient. Comme il sait que ce redressement ne peut se faire sans les entreprises et le privé. De là à dire comme Manuel Valls, le Premier ministre français, qu’il aime les entreprises? Il y a encore du travail. Mais Paul Magnette aime les entrepreneurs et il sait que le redressement passe par un pacte avec les entreprises.
Reste maintenant à voir la ligne qu’il adoptera par rapport à la coalition "suédoise", plus portée sur le soutien au monde des entreprises mais dont la genèse a déjà été fortement ébranlée par son président de parti Elio Di Rupo.
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