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Les finances communales ont bien résisté à une législature turbulente

L’étude annuelle de Belfius indique une aggravation des déficits communaux, en raison de la crise financière. Ce recul reste toutefois limité. Mais les réserves ne pourront éternellement compenser…

La banque Belfius a remis hier son étude annuelle sur les finances locales. A quelques mois des élections communales, elle prend une saveur particulière et permet de tirer un premier bilan financier de cette législature communale.

 

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Express

  • Il en ressort que le déficit des communes s'est détérioré au cours de la législature, surtout en Flandre. Elles disposent toutefois encore de réserves suffisantes pour dégager un boni de 1,217 milliard à l'exercice global.
  • Cette détérioration provient de la croissance de certaines dépenses (notamment en faveur des zones de police et des CPAS), tandis que les recettes fiscales se sont bien maintenues malgré la crise.
  • L'analyse de Belfius tord le cou à un canard: les communes ne multiplient plus les investissements en année électorale. La prudence budgétaire semble donc avoir pris le pas sur la propagande.

Crise

1/ Comment les budgets communaux ont-ils traversé la crise économique et financière?

Budgétairement, les communes ont plutôt bien résisté. Certes, le solde budgétairement s’est détérioré (322 communes en déficit à l’exercice propre, pour un montant cumulé de 374 millions) et le nombre de communes dans le rouge a augmenté au cours de la législature. Mais, les réserves permettent toujours de compenser à l’exercice global, où le boni est encore de 1,217 milliard.

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Il s’agit toutefois là d’une évolution contrastée: dégradation en Flandre (12 communes en déficit à l’exercice global) et quasi-retour à l’équilibre en Wallonie (6 déficits) et à Bruxelles (1). Les données 2012 se basent évidemment sur les budgets. Or, l’expérience indique que les communes améliorent généralement leur solde aux comptes.

La comptabilité européenne (SEC95) est désormais appliquée aux communes. On craignait un effet très négatif. Cela ne semble pas être le cas puisque l’Institut des comptes nationaux les place à un poil de l’équilibre. Leur solde s’est toutefois considérablement détérioré, passant de + 725 millions en 2008 à -158 millions en 2011 (sur un déficit public total de 13,7 milliards).

Fiscalité

2/ La pression fiscale des communes a-t-elle augmenté durant la législature?

La crise n’a pas empêché les recettes fiscales (plus de 50% des ressources communales) de progresser de 3,8% sur la législature contre 4% lors de la précédente. Le rendement des additionnels à l’IPP a même augmenté plus vite qu’avant (4%). "Cela s’explique par l’indexation des revenus, qui a augmenté la base imposable, et l’accélération de l’enrôlement", commente Frank Lierman, chief economist chez Belfius, qui convient donc que la crise a eu moins d’impact sur l’évolution des additionnels à l’IPP que la réforme fiscale de 2001.

Les communes n’ont que très faiblement augmenté leurs impôts ces six dernières années. Le taux moyen des additionnels à l’IPP est passé de 7,3 à 7,38% et celui des additionnels au précompte immobilier de 2.552 à 2.607 centimes. Ces hausses, moindres que celles de la précédente législature (surtout sur le précompte immobilier), eurent lieu en début de mandat, soit avant le déclenchement de la crise. Ces deux impôts génèrent un peu plus de 40% des recettes communales. La Wallonie pratique des taux plus élevés à l’IPP mais plus faibles au précompte immobilier.

Les taxes locales (9% des recettes communales) ont, elles, progressé plus faiblement: + 2,8%. On note toutefois une brusque accélération dans les budgets 2012, avec une hausse prévue de 4,3%. Il existe quelque 120 taxes locales, selon "la créativité" des dirigeants. Elles concernent principalement les déchets (29,6%), l’activité économique (diffusion publicitaire, séjours…), les parkings, les spectacles etc. Ces taxes spécifiques ont plus augmenté dans les grandes villes, en particulier en raison du parking.

Dividendes

3/ La liquidation du Holding communal (qui gérait les participations communales dans Dexia) pèse-t-elle sur les budgets communaux?

Évidemment, personne n’aime perdre une recette. Il faut toutefois relativiser: les produits financiers ne représentent qu’une faible part des recettes communales (4,7% en 2012) et le dividende du holding n’était qu’un de ces produits financiers.

Le plus gros dividende du Holding fut celui de l’exercice 2007 avec 104,9 millions d’euros. Le versement moyen depuis 1997 était de 83 millions d’euros.

Cela reste une perte tout à fait gérable dans un ensemble avec 14 milliards d’euros de recettes communales.

La difficulté, c’est que cette perte survient alors que les dividendes versés par les intercommunales de distribution d’électricité sont, eux aussi, revus à la baisse en raison de la libéralisation.

Dépenses

4/ Les communes ont-elles comprimé leurs dépenses en raison de la crise?

Clairement non. Les dépenses ont progressé en moyenne de 3,3% par an au cours de l à législature, ce qui dépasse largement l’inflation. La principale dépense reste le personnel (39%, hors personnel enseignant, entièrement financé par les Communautés), dont le coût a progressé de 3,8% par an.

Près de 110.000 personnes (Équivalent temps plein) travaillent dans les administrations communales. Cela représente une charge de 526 euros/habitant (772 euros dans les villes de plus de 50.000 hab, où l’on sous-traite moins les travaux de construction, de plantations…).

Ces chiffres n’incluent pas les agents des zones de police (32.000 ETP). Une commune paie en moyenne 137 euros/hab pour sa zone de police. Mais cette contribution grimpe jusqu’à 327 euros/hab dans les grandes villes. Le financement fédéral (en théorie 40% du budget de la zone) n’est pas adapté à cette forte disparité. Il en résulte un net sous-financement fédéral des polices urbaines, selon les chiffres de Belfius.

Les dépenses des CPAS ont augmenté de 4,4% par an (5,6% dans les grandes villes) au cours de la législature contre à peine 0,5% précédemment. Cela atteste de la paupérisation de la population (surtout urbaine) mais aussi de missions nouvelles (exclusions du chômage) et du vieillissement (extension des maisons de repos gérées par les CPAS).

Pensions

5/ Comment les communes vont-elles payer les pensions de leurs fonctionnaires?

Depuis que les communes ont pris le pli de ne plus nommer leurs fonctionnaires, mais d’engager des contractuels, les réserves de l’ONSSAPL (l’organisme qui gère la pension des agents des pouvoirs locaux) fondent comme neige au soleil. Les communes ne comptent plus dans leurs rangs que 41,7% de fonctionnaires nommés.

Cette érosion du personnel statutaire fait fondre la base qui cotise pour payer les fonctionnaires à la retraite. Afin de redresser la barre, une réforme a été engagée sous le gouvernement précédent. Mais elle n’est pas indolore pour les finances communales… D’une part, elle prévoit une responsabilisation des communes. Objectif: relancer les nominations afin d’augmenter l’assiette des fonctionnaires cotisant à l’ONSSAPL.

D’autre part, cette réforme augmente progressivement le taux de cotisation des différents "pools" dans lesquels sont répartis les fonctionnaires afin d’arriver à un taux uniforme de 41,5% d’ici 2016, et garantir ainsi la viabilité du système. En 2012, cette hausse des taux entraîne un surcoût pour les communes de 90 millions d’euros. À l’horizon 2016, la facture totale s’élèvera à 406 millions d’euros.

Investissement

6/ Les communes sont-elles toujours le premier investisseur public du pays?

Oui, elles contribuent à 46,3% des investissements publics en Belgique. Les communes consacrent environ 11% de leurs dépenses, contre 5% aux Communautés et Régions et moins de 2% pour l’État fédéral.

Sur la législature, les communes ont investi en moyenne 2,8 milliards d’euros par an, soit 250 euros/hab. Les domaines d’intervention les plus fréquents furent les voiries (26%), l’urbanisme et aménagement des espaces publics (20%) et les infrastructures culturelles et sportives (18%).

L’analyse de Belfius relève une légère progression des investissements en fin de législature, dans des proportions nettement moindres qu’avant l’échéance de 2006. "L’élan a été un peu brisé en milieu de législature, en raison de la crise, commente Arnaud Dessoy, économiste chez Belfius. Ce sont des dépenses facultatives, elles ont été reportées ou supprimées par prudence budgétaire."

Les investissements des communes sont financés par les emprunts (35%), l’épargne propre (30%), des subsides (17%) et des ventes de patrimoine (12%).

Dette

7/ L’endettement des communes s’est-il alourdi au cours des six dernières années?

Belfius parle d’un niveau d’endettement "globalement maîtrisé". Il s’élève aujourd’hui à 15,3 milliards d’euros, ce qui situe les communes belges en dessous du ratio moyen dettes/PIB dans l’Union européenne.

Cette dette est même en recul par rapport à l’ensemble des recettes communales (98 à 89%). En outre, grâce aux baisses de taux et aux aides régionales (la Flandre a pris en charge la dette de ses communes à concurrence de 100 euros/hab), les charges financières ont reculé de 0,7% au cours de la législature. "Il sera toutefois difficile de les comprimer encore à l’avenir", estime Arnaud Dessoy.

Les communes sont tenues d’être en équilibre à l’exercice global (réserves incluses). Leur dette est donc principalement une dette d’investissement, avec un actif en vis-à-vis, ce qui la distingue de la dette des autres niveaux de pouvoir. La dette d’assainissement, qui avait progressé de 5,5% lors de la législature précédente, a cette fois diminuée de 0,4%. C’est un plus qualitatif pour la dette des communes.

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