Échec au sommet sur les nominations européennes
Les Vingt-Huit ne sont pas parvenus à trouver un accord sur les grands postes de l'Union européenne. Après l'élection de Jean-Claude Juncker comme Président de la Commission, le Conseil européen devait désigner des successeurs à la Haute représentante Catherine Ashton, au président du Conseil Herman Van Rompuy ou encore au chef de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem. Ils se donnent rendez-vous pour un nouveau sommet le 30 août prochain, au cours duquel Herman Van Rompuy est "tout à fait certain" qu'un accord global sur les postes sera trouvé.
Sur son carton d’invitation, Herman Van Rompuy avait joué la prudence. Formellement, le président du Conseil européen n’a pas convoqué les Vingt-Huit pour arrêter les noms des élus aux hautes fonctions européennes. Mais pour leur "faire rapport" de l’avancée de ses consultations. Trois semaines après le sommet qui a désigné Jean-Claude Juncker pour la présidence de la Commission, la réunion exceptionnelle de ce 16 juillet était pourtant bien censée mettre de nouveaux visages sur quelques hautes fonctions, désigner des remplaçants à Catherine Ashton, Jeroen Dijsselbloem et Herman Van Rompuy lui-même... Ou à tout le moins – si tant est qu’un saucissonage puisse aider – à la Haute représentante de l’Union pour les Affaires étrangères.
"Ce sommet a été mal préparé", grincaient plusieurs diplomates dans les couloirs du bâtiment Juste Lipse, où avait lieu la réunion. "Pour se mettre d'accord sur des noms pour des postes extrêmement importants, on a besoin de temps", s'est défendu le président du Conseil au cours d'une conférence de presse au milieu de la nuit. Herman Van Rompuy a convoqué les Vingt-Huit pour une nouvelle réunion le 30 août, ajoutant être "tout à fait certain" qu'un "accord global" sera trouvé - "sur le Haut représentant, le Président du Conseil et d'autres éléments". Le 30 août tombe un samedi : commode pour une négociation au "finish".
Jean-Claude Juncker, élu haut la main par le Parlement européen mardi, avait manifesté son intention d'aller vite, et de former son collège avant la pause estivale. Le patron du Service d’action extérieure fait partie de la Commission, Juncker aurait donc voulu avoir son nom dès mercredi soir. Il est forcé de faire une croix dessus, mais que cela ne l'empêche pas d'avancer, a souligné Van Rompuy: "Il peut profiter de cette période intermédiaire pour commencer à préparer [la formation de sa Commission] avec l'aide des noms qu'il recevra des États membres." Plusieurs pays - comme l'Allemagne et le Royaume-Uni - ont déjà fait connaître le nom du commissaire qu'ils comptent envoyer à Bruxelles.
Puzzle complexe
Si les noms les plus souvents cités sont ceux qui doivent remporter la mise – ce qui se vérifie rarement –, la ministre italienne des Affaires étrangères Federica Mogherini, une socialiste, partait favorite pour succéder à Catherine Ashton. Un sérieux bémol entrave cependant sa route: l’opposition en bloc des pays baltes, qui lui repprochent une attitude trop conciliante à l’égard de la Russie. Et Jean-Claude Juncker ne semble lui-même pas emballé par la jeune candidate (41 ans), lui qui réclame pour ce poste une personne "respectée et expérimentée". D’autres noms circulent toujours, comme alternatives – dont celui de la Bulgare Kristina Georgieva.
Mais si la désignation de Juncker aura été une évidence dictée par les urnes, le choix du nom d’un Haut représentant n’est qu’une pièce d’un échiquier complexe, et l'isoler n'est pas/plus à l'ordre du jour. La distribution des "hautes fonctions" exige à l’arrivée un équilibre entre Europe occidentale et centrale, Europe du Nord et du Sud. L’équilibre des genres, aussi : "le Parlement ne se satisfera pas d’un statu quo", a prévenu son président, Martin Schulz. Enfin, il va sans dire que les sensibilités politiques doivent être ménagées.
Au cours d’une réunion d’avant Sommet, les leaders de gauche ont convenu de soutenir non seulement Federica Mogherini pour l’Action extérieure, mais également la Première ministre danoise Helle Thorning-Schmidt. Connue pour son selfie avec MM. Obama et Cameron, elle est présentée comme candidate à la succession de Van Rompuy.
Mais les conservateurs ont eux aussi des vues sur la présidence du Conseil – ils ont notamment avancé leurs pions Irlandais et Polonais, Enda Kenny et Donald Tusk. Accepteront-ils de le lâcher en échange de la présidence de l’Eurogroupe, qui selon certains diplomates est déjà promise au ministre espagnol des Finances De Guindos ?
Il faudrait encore trouver de quoi satisfaire les libéraux, représentés par quatre leaders au Conseil et membres de la coalition qui soutient Juncker au Parlement. L’ancien Premier Estonien Andrus Ansip est cité pour le Conseil, et les libéraux poussent la candidature de Karel De Gucht pour la succession d’Ashton. S’ils n’emportent pas l’un des grands postes, ils pourraient être tentés d’exiger des garanties pour des fonctions intéressantes dans la Commission Juncker – le "package" s’élargirait alors aux postes convoités de la Commission (Affaires économiques, Concurrence, Commerce...).
À croire Herman Van Rompuy, l'accord global interviendra donc à la fin du mois prochain. Au fond, rien ne presse vraiment: la Commission Juncker n’est censée entrer en fonction qu’au 1er novembre.
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