Tu vas acheter un sandwich? Oublie pas ta Wood'dwich!
Pour se faciliter la vie et réduire leurs déchets, deux jeunes menuisiers ont eu l'idée de créer un contenant en bois pour leur déjeuner. Une idée qui s'est transformée en concept et que le duo d'entrepreneurs tente aujourd'hui de développer.
Niché à proximité du canal, à deux pas du site de Tour & Taxis, l’atelier de Bois Noble se découvre au bout d’un porche à l’intérieur d’un bâtiment résidentiel molenbeekois. Après avoir passé le haut portail, la poussière de bois vient directement vous chatouiller les narines alors que se dévoilent les machines, dont l’impressionnante nouvelle panneauteuse, récent investissement de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Cet écrin ligneux au cœur de la ville est l’antre de Thibault Collard et de Kevin Mornard. Les deux jeunes trentenaires se sont rencontrés pendant leur formation à l’efp d’Uccle. Thibault a appris la menuiserie pendant trois ans avant de compléter son cursus par deux années d’ébénisterie, Kevin a fait l’inverse.
"Je suis passionné par le bois depuis ma plus tendre enfance", explique Thibault Collard. "Adolescent, j’ai commencé à suivre des ateliers de menuiserie tout en restant dans l’enseignement général. J’aime avoir un résultat tangible à la fin de la journée, le travail de bureau n’est pas fait pour moi", sourit-il.
Kevin Mornard a quant à lui été poussé dans la marmite par son grand-père. Celui-ci était bijoutier et particulièrement doué avec ses mains. Il disposait d’un petit atelier de menuiserie où Kevin aimait passer du temps dès son plus jeune âge. "J’ai voulu devenir menuisier à 8 ou 9 ans", se remémore-t-il. "Rester toute la journée derrière un PC, non merci!"
Si l’administratif n’est pas leur tasse de thé, le travail manuel n’est pas sans risque. "C’est impossible de ne pas se blesser dans ce genre de métier", concède Thibault Collard. Lui-même s’est déjà coupé deux tendons dans l’exercice de sa passion, tandis que Kevin Mornard s’est lui sérieusement entaillé un doigt.
À la sortie de l’école, chacun prend son propre chemin. Thibault devient stagiaire chez Bois Noble avant de racheter la moitié des parts de la TPE en 2014. Plus tard, il recroise Kevin un peu par hasard chez un fournisseur. La complicité est toujours là, les ambitions similaires, la vision concordante. En 2017, Kevin rachète la seconde moitié de l’entreprise à l’ancien patron.
Une demande qui évolue
Aujourd’hui, Bois Noble est une microentreprise qui tourne. Les deux jeunes entrepreneurs sont épaulés par deux autres collaborateurs et les commandes s'empilent.
"Nous travaillons exclusivement sur mesure et faisons beaucoup d’agencement intérieur. Nous intervenons là où le prêt-à-meubler s’arrête. C’est le client qui décide, nous devons accepter de faire un peu de tout et nous adapter", explique Thibault Collard.
Les demandes de la clientèle ont évolué avec la prise de conscience environnementale. Un mouvement générationnel que les deux associés ont évidemment embrassé. Quoi de plus naturel que de fonctionner de manière écologique quand on travaille le bois après tout?
"Nous étions évidemment déjà tous les deux sensibilisés à la question, et on a voulu aller le plus loin possible", indique Kevin Mornard. Bois Noble travaille avec des matériaux locaux dans la mesure du praticable. Le bois lui-même n’est pas exclusivement belge, mais essentiellement européen.
"Pour les articles d’extérieur, nous sommes obligés de travailler avec des bois plus exotiques d’Afrique ou d’Asie, qui résistent beaucoup mieux aux conditions météorologiques", ajoute Thibault Collard.
Pour ses finitions, l’entreprise utilise des huiles et des cires naturelles ou encore des peintures acryliques bio. Les copeaux de bois générés par ses travaux sont recyclés pour être utilisés dans des toilettes sèches. "Nous avions envisagé d’acquérir une camionnette électrique, mais c’est encore compliqué", avancent-ils, en raison de son coût et de son autonomie.
Marre des emballages
"Nous allions chercher un sandwich tous les jours et nous avons vite été écœurés de tous les emballages à usage unique employés pour un morceau de pain."
Thibault et Kevin sont effectivement souvent en déplacement jusque dans le Limbourg ou le Hainaut. C’est en emportant quotidiennement leur casse-croûte sur leurs chantiers qu’une idée a germé dans leurs esprits au printemps 2019.
"Nous allions chercher un sandwich tous les jours et nous avons vite été écœurés de tous les emballages à usage unique employés pour un morceau de pain", fait valoir Kevin Mornard.
Constatant qu’aucune boîte à tartine ne correspond au format "baguette", ils planchent sur la conception d’un contenant pour sandwiches réutilisable. En bois, évidemment.
C’est ainsi qu’est né la Wood’dwich, un récipient composé de deux coques en bois de hêtre labellisé PEFC de 35,5 centimètres de long. L’article fait neuf centimètres de diamètre et pèse quelque 350 grammes.
À l’intérieur, un coton alimentaire imbibé de cire d’abeille certifiée Agriculture biologique protège l’aliment. Il est facile à laver et quasiment imperméabilisé contre les taches grasses. L’ustensile se ferme grâce à un bouton en laiton vieilli et une lanière en cuir rond. "Nous avons cherché une solution de remplacement végétale, mais n’avons pas encore trouvé quelque chose de satisfaisant."
Initialement, la Wood’dwich était uniquement destiné à leur usage personnel. Il faut dire qu’il n’est pas particulièrement facile à produire, notamment en raison du centrage des coques en hêtre.
"Puis, de plus en plus de gens se sont montrés intrigués par notre boîte à sandwich et nous ont demandé où on pouvait s’en procurer. On a alors commencé à en réaliser d’autres et à les vendre", explique Thibault Collard.
Un processus qui n’était pas naturel pour les deux menuisiers-ébénistes: ils font du sur mesure et la Wood’dwich est leur premier, et pour l’instant seul, produit en série. Ils s’y attellent dès lors lorsqu’ils ont quelques heures de libres entre leurs différentes commandes.
"Ça nous permet de combler les trous. C’est un produit artisanal plutôt gai à faire", se réjouit Kevin Mornard.
Des commandes dans le Pacifique
"C’est un produit artisanal plutôt gai à faire."
Si, avec un prix de 35 euros par unité, il s’avère rentable dans le cas d’une vingtaine de ventes par semaine, là n’est pas l’objectif recherché par le duo. Il n’a ainsi pas déposé de brevet pour sa conception. "C’est une question d’éthique. On veut faire du zéro déchet, on ne va pas empêché quelqu’un d’autre de le reproduire."
Depuis septembre, Bois Noble a vendu quelques centaines de Wood’dwiches. Une quinzaine de magasins bio le proposent en Belgique, de même que deux commerces en France.
"Par internet, nous avons même reçu des commandes d’Allemagne, de Norvège, mais aussi de la Réunion et de Nouvelle-Calédonie!", s’amusent-ils, même s’ils ne sont pas en mesure d’assurer ces dernières. "Les réseaux sociaux peuvent booster un projet de manière incroyable."
Le carnet de commandes se remplit effectivement bien et le processus s’améliore progressivement. Les deux compères ont d’ailleurs déjà dû prolonger certaines soirées et travailler le week-end pour honorer des bordereaux. "On prend des notes à chaque étape. Si le succès est au rendez-vous, on devra revoir notre organisation, voire engager une personne en plus", conclut Thibault Collard.
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