Le carry trade, pointé du doigt pour la chute des bourses
Le dénouement des positions de carry trade sur le yen est désigné comme responsable de la chute des marchés d'actions. Mais selon JPMorgan, il reste encore 50% de celles-ci à dénouer.
À l'origine de la chute des marchés d'actions lundi dernier se trouve une pratique spéculative. Appelée carry trade, celle-ci consiste à emprunter de l'argent dans une monnaie d'un pays dont la banque centrale pratique des taux faibles, pour l'investir dans une devise aux rendements plus élevés. Le yen s'est retrouvé au centre de cette pratique, car la banque du Japon a maintenu pendant de longues années ses taux d'intérêt en négatif et poussé de nombreux investisseurs professionnels à emprunter dans la monnaie japonaise, pour acheter notamment des actifs en dollars.
Mais depuis le mois d'avril de cette année, la banque centrale du Japon a changé son fusil d'épaule et s'est mise à augmenter ses taux d'intérêt. Le 31 juillet, elle a encore relevé ses taux de 0,25%, afin d'enrayer la chute du yen face au dollar.
L'action de la banque centrale japonaise la semaine dernière a provoqué une hausse du yen face aux autres devises. La monnaie a bondi de 7,5% face au dollar, et mis à mal les traders qui pratiquent un carry trade sur le yen. Les investisseurs qui ont emprunté dans la devise japonaise ont été frappés par des appels de marge, c'est-à-dire que leurs courtiers ont exigé une augmentation du dépôt mis en garantie pour couvrir leurs positions. Afin d'honorer ces exigences, les investisseurs ont été forcés d'acheter du yen, ce qui a fait grimper la devise, et provoqué d'autres appels de marge.
Un dénouement pas terminé
Ce dénouement de positions sur le yen a été massif, même s'il est difficile à estimer. Une manière d'en juger l'ampleur est de regarder les contrats à terme misant sur la baisse du yen, enregistrés par la Commodity Futures Trading Commission aux États-Unis. Ses données montrent que les hedge funds et autres investisseurs détenaient au début du mois de juillet plus de 180.000 contrats de ce type, pour une valeur de 14 milliards de dollars.
Une autre manière d'estimer l'ampleur du carry trade sur le yen s'avère par les prêts à l'étranger des banques japonaises, qui s'élevaient à 1.000 milliards de dollars à la fin mars. Ces prêts ont "généralement été fonction de la demande des investisseurs mondiaux pour des opérations de carry trade financées par le yen", constatent les analystes de JPMorgan.
Ceux-ci estiment que seulement 50% à 60% de ces positions ont été dénouées. Les analystes d'UBS tirent le même constat.
L'impact sur les marchés d'actions
Pour acheter du yen afin d'honorer leurs appels de marge, les investisseurs impliqués dans le carry trade sur la devise japonaise ont dû vendre leurs actifs, et notamment leurs actions. Ceci explique la claque que les marchés boursiers ont connue lundi, en particulier à la Bourse de Tokyo.
"Si l'on compare ce dénouement avec celui du carry trade de 1998 (dollar-yen), on peut penser que d'autres dénouements sont à venir"
Si le yen continue de grimper et alimente les dénouements du carry trade sur la devise, cela signifie que les tourments sur les marchés d'actions ne sont pas terminés à court terme. C'est ce que pensent de nombreux analystes.
James Malcolm, responsable de la stratégie macro chez UBS, se rappelle qu'en 1998, en pleine crise asiatique, un tel dénouement du carry trade financé en yen pour acheter du dollar a eu lieu. "Si l'on compare ce dénouement avec celui du carry trade de 1998 (dollar-yen), on peut penser que d'autres dénouements sont à venir", indique-t-il. Il faut toutefois se souvenir qu'en 1998, le S&P 500 avait ignoré les problèmes en Asie, et terminé l'année sur une forte progression de 26,67%. Rien ne dit que cette fois-ci, l'indice finira 2024 sur une pareille évolution.
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