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La Bourse rapporte plus que l'immobilier

©© Clément Philippe

Des économistes de Credit Suisse et de la London Business School contestent la croyance selon laquelle l’immobilier offre un meilleur rendement que la Bourse. Sur les 118 dernières années, ce sont bien les actions qui ont été les plus rentables.

Deux guerres mondiales, deux crises financières globales, une explosion démographique (de 1,6 à 7,5 milliards d’êtres humains), et au final, une réalité économique étonnante: entre 1900 et 2018, les actions ont été plus profitables que l’immobilier.

C’est ce que concluent des économistes de Credit Suisse et de la London Business School, dans le Credit Suisse Global Investment Return Yearbook. Celui-ci évalue chaque année l’évolution sur le très long terme des rendements par classes d’actifs (actions, obligations, objets d’art, vins ou immobilier).

Dans cette étude réalisée à partir des données récoltées aux Etats-Unis, au Canada, dans dix pays de la zone euro (dont la Belgique), dans six pays européens hors zone euro, dans quatre pays asiatiques (dont la Chine et le Japon) et en Afrique du Sud, ils relativisent le mythe de la pierre nourricière, conçu dans la deuxième partie du XXe siècle, et tout particulièrement entre 1990 et la crise des subprimes de 2007.

Cette explosion des prix de l’immobilier, au tournant du millénaire, n’était guère plus qu’un épiphénomène, dopé par les prêts bancaires. En Belgique, le prix réel des propriétés, en tenant compte de l’inflation, a été longtemps inférieur à celui du début du vingtième siècle. Il a fallu attendre le début des années 1970 pour le voir être supérieur à celui de l’origine. Il a explosé à partir de 1990, jusqu’à la crise financière, avant de retomber à un rythme de progrès lent. Entre 1900 et 2017, les prix réels de l’immobilier ont progressé de 1% par an en Belgique.

©Mediafin

L’immo a perdu 2,1% par an depuis 1900!

La seule variation du prix des biens immobiliers, même en tenant compte de l’inflation, ne suffit pas pour mesurer la pertinence de cet investissement. Les économistes ont donc introduit une donnée spécifique: l’évolution de la qualité des biens. Autrement dit, les coûts de rénovation, d’adaptation ou de mises aux normes nécessaires pour maintenir l’attractivité d’un bien. Le verdict est clair: entre 1900 et 2017, le capital investi au départ a été déprécié en moyenne de 2,1% par an. Assez loin, donc, des 5,2% de rendement réel annuel obtenus sur les actions au niveau mondial (2,5% pour le rendement réel des actions belges, près de trois fois plus pour les actions américaines).

-2,1%
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Entre 1900 et 2017, le capital investi dans l’immobilier s’est déprécié de 2,1% par an (en tenant compte des coûts de rénovation et de mise aux normes) alors que le rendement réel annuel des actions mondiales atteint 5,2%.

"Bien que les prix des biens immobiliers ait surperformé celui des actions en 2018, nos conclusions restent intactes, explique à L’Echo Paul Marsh, de la London Business School, en complément de la mise à jour de la dernière édition du Yearbook, effectuée au début du printemps. Sur le long terme, le fait est que les actions ont fourni un meilleur rendement que l’immobilier."

Il précise toutefois que les données récoltées sur l’immobilier sont moins précises que celles obtenues sur les actions, surtout dans le cadre d’une étude internationale. Les loyers obtenus par les propriétaires investisseurs n’ont ainsi pas pu être correctement comptabilisés, faute d’enregistrements fiables. Mais ceux-ci représentent une part très relative du comptage et ne changent que marginalement le chiffre final de -2,1%. L’investissement dans l’immobilier commercial n’a également pas été pris en compte.

"Les actions fournissent à leurs détenteurs une importante prime au risque sur le long terme."

Un investisseur chanceux qui a acheté un bien immobilier à la fin des années 80 et qui l’a revendu en 2007 a profité d’un rendement réel annuel de 6,2% avec d’importantes disparités selon les pays (explosion des prix en Australie et au Royaume-Uni, quasi-stagnation aux Etats-Unis ou en Suisse). Même en tenant compte de l’évolution de la qualité du logement, il a toujours été gagnant à la fin et n’a pas été concerné par cette tendance forte sur le long terme. S’il a conservé sa propriété depuis, le rendement est en revanche en partie retombé. Par ailleurs, ce rendement ne tient pas compte des taux des crédits immobiliers très élevés durant cette période (entre 4 et 10%). S’il a acquis sa propriété avec 70% de crédit sur la valeur du bien, il est probable qu’il ait au final perdu de l’argent malgré cette conjoncture immobilière exceptionnelle.

Reste à connaître l’évolution du marché dans les décennies à venir. Pour les auteurs du Yearbook, "les prix des biens de l’immobilier vont continuer de fournir un rendement et un niveau de risque intermédiaire entre celui des actions et des obligations. Les propriétés résidentielles ne doivent pas être achetées avec des attentes exagérées d’une grande prime au risque. La réalité, c’est que les actions fournissent à leurs détenteurs une importante prime au risque sur le long terme."

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