La faillite de FTX fait trébucher le marché des cryptos
L'ancien numéro 3 mondial des cryptomonnaies s'est déclaré en faillite ce vendredi, fragilisant au passage un secteur déjà particulièrement malmené cette année.
La nouvelle était attendue par le marché crypto, elle l'a néanmoins attaqué de plein fouet. La plateforme d'échange FTX a annoncé ce vendredi, dans un communiqué de presse, se placer avec plus de 130 de ses filiales sous la loi américaine de protection des faillites. Son CEO, Sam Bankman-Fried, a démissionné.
L'annonce est un nouveau revers pour les crypto-investisseurs, qui ont vécu une vraie saga "à la Dallas" cette semaine. Accusations, sauvetage, trahison et finalement banqueroute: les tourments de la plateforme FTX ont fait trembler les détenteurs de devises numériques, dont les portefeuilles ont dégringolé en quelques jours, alors que l'année 2022 les avait déjà vus s'écrouler face au resserrement monétaire inédit des banques centrales.
Depuis lundi, le bitcoin a perdu plus de 20% de sa valeur, tandis que le marché crypto dans son ensemble a fondu de 200 milliards de dollars. La première cryptomonnaie mondiale est ainsi repassée sous son pic de 2017, de 17.000 dollars, lorsqu'une première grande vague d'engouement avait déjà alarmé le monde de la finance traditionnelle.
Un bilan plus que douteux
Les débuts de cette affaire rocambolesque remontent au 2 novembre, lorsqu'un média spécialisé mettait en lumière la situation financière douteuse d'Alameda Research, une firme d'investissement aux mains de Sam Bankman-Fried, CEO de FTX, encore récemment valorisée à 32 milliards de dollars.
D'après des sources, le bilan d'Alameda Research reposerait en grande partie sur la cryptomonnaie maison de FTX, le FTT. Autrement dit, ses fonds propres étaient majoritairement composés de cryptomonnaies émises par sa société sœur.
Réagissant à la nouvelle, Changpeng Zhao, le patron de Binance, première plateforme d'échange de cryptomonnaies au monde, avait décidé dimanche de vendre tous les FTT dont disposait encore son entreprise, hérités d'une ancienne participation dans FTX vendue l'année dernière pour 2,1 milliards de dollars.
Tentant de rassurer les investisseurs qui fuyaient en masse la plateforme, les dirigeants d'Alameda Research et de FTX avaient expliqué que le bilan cité dans la presse ne concernait qu'une partie de ses entités. Le soulagement pour Sam Bankman-Fried était arrivé mardi soir, quand Changpeng Zhao avait annoncé sur Twitter que Binance se proposait de racheter la plateforme en détresse.
L'offre a été annulée 24 heures plus tard, Binance citant les rapports sur la mauvaise gestion des actifs des clients et les enquêtes en cours de la SEC (Securities and exchange commission), gendarme américain des marchés, et du département de la Justice des États-Unis.
FTX suspendue dans l'Union européenne
De son côté, Sam Bankman-Fried avait alors annoncé aux investisseurs de FTX avoir besoin d'un financement d'urgence en raison des demandes de retrait démultipliées des clients reçues ces derniers jours, désormais dans l'incapacité de retirer leur argent.
"J'ai merdé."
"J'ai merdé", a-t-il même avoué. La société manquerait d'au moins 8 milliards de dollars. La fortune personnelle du CEO, estimée à 16 milliards de dollars il y a quelques jours, a déjà été réduite quasi à néant.
Le régulateur financier des Bahamas, paradis fiscal où la société était basée, avait déjà gelé ses actifs par précaution, tandis que les régulateurs australien et japonais avaient pris des mesures similaires pour protéger les consommateurs. La licence de FTX dans l'Espace économique européen (UE, Norvège, Islande et Liechtenstein) a également été suspendue, comme l'a confirmé le régulateur financier de Chypre, où la plateforme était enregistrée depuis deux mois à peine.
"Une vague de délestage des cryptomonnaies"
Face à l'effondrement de celle qui fut un temps la 3e plateforme mondiale, les analystes de JPMorgan voient déjà poindre "une nouvelle vague de délestage des cryptomonnaies".
"Les événements de ces derniers jours vont probablement changer la façon dont les investisseurs institutionnels interagissent avec les plateformes."
Plus largement, c'est même une contagion au système financier dans son ensemble qui est redoutée, les observateurs faisant le lien avec la chute du "stablecoin" (cryptomonnaie adossée à une vraie devise comme le dollar) TerraUSD, qui avait causé un vent de panique sur le marché au mois de mai dernier.
Le problème spécifique à la situation actuelle est, selon eux, que "FTX, en particulier, a été préféré à Binance par les clients institutionnels tels que les hedge funds". Alors que les gestionnaires de fonds mondiaux e sont lancés dans une myriade de partenariats cryptos ces derniers mois, "les événements de ces derniers jours vont probablement changer la façon dont les investisseurs institutionnels interagissent avec les plateformes".
Premières victimes institutionnelles de l'implosion de FTX: le groupe japonais Softbank, qui avait investi 100 millions de dollars dans la plateforme, et Sequoia Capital, dans qui la holding belge cotée Sofina détient des parts. Le géant du capital risque de la Silicon Valley a réduit la valorisation de son investissement dans FTX de 213 millions de dollars à zéro, une participation minime au vu des 85 milliards de dollars d'actifs sous sa gestion.
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