(l'écho) La réalité n'est toutefois pas aussi simple. Car si les cours des matières premières ont en effet flambé, le prix du pétrole également, ce qui ne fait pas l'affaire de la majorité des pays africains. En outre, toutes les matières premières ne sont pas porteuses.
Les exportateurs de pétrole, comme le Nigeria, s'en sortent mieux, mais leur rating ne sera pas relevé dans l'immédiat.
Matières premières
Pour les pays exportateurs de matières premières, ces dernières années sont du pain bénit. La demande de matières premières ne cesse de croître, l'offre n'arrive pas à suivre et du coup les prix flambent. En toute logique, les principaux pays exportateurs de matières premières devraient voir leur profil financier nettement s'améliorer, grâce entre autres à une balance commerciale avantageuse.
En théorie, ce raisonnement tient la route, mais en pratique les choses ne sont pas aussi simples.
La plupart des pays exportateurs de matières premières sont situés au-delà du Sahara. Les économies du sud de l'Afrique par exemple sont fort dépendantes de leurs exportations en minéraux et métaux, ce qui inclut l'or, les diamants et le platine, alors que le coton, le pétrole, le cacao et les autres matières premières agricoles sont généralement exploités dans l'ouest de l'Afrique.
Pétrole
Sur les 13 pays de ce coin du globe, seuls quatre peuvent se targuer d'une amélioration de leur balance commerciale. Il s'agit du Nigeria, du Mozambique et du Cameroun, et dans une moindre mesure du Bénin. Les autres pays, comme le Burkina Faso, le Ghana ou Madagascar ont, par contre, vu leur balance commerciale se détériorer . «Une explication à ce décalage entre la richesse des sous-sols de certains pays et la dégradation de leur balance commerciale a trait au pétrole. Clairement, pour le Nigeria et le Cameroun, les deux exportateurs de pétrole de la zone économique étudiée, la hausse des prix pétroliers a eu une influence très positive sur leur balance commerciale. Le Nigeria, pour qui le pétrole totalise 70% des exportations, a vu ses finances nettement s'améliorer. Les accrocs dans la production d'or noir dans le delta du Niger, suite à une intense activité de milices hostiles aux groupes pétroliers, n'ont finalement que peu d'influence grâce à une augmentation de la production ailleurs dans le pays», explique l'agence de notation financière Standard & Poor's '(S&P). Le Cameroun ressent moins les effets positifs de sa manne pétrolière qui ne compte que pour 40% du total de ses exportations.
Echanges commerciaux
Les autres pays africains subsahariens sont, en revanche, dépendants de leurs importations de pétrole. La hausse des prix de l'or noir ces dernières années a évidemment détérioré les conditions des échanges commerciaux pour ces pays. Une autre explication, avancée par S&P, aux piètres conditions des échanges commerciaux auxquelles doivent faire face les pays africains subsahariens non exportateurs de pétrole est la présence dans leurs exportations de matières premières peu performantes. Car si globalement les ressources naturelles se portent bien grâce à une nette augmentation de la demande, toutes ne sont pas concernées. Le coton et la vanille par exemple n'ont pas la cote pour le moment. «Dans les pays développés, les producteurs de coton ont reçu des subsides, ce qui a déprimé l'ensemble du marché et a surtout pesé sur les pays émergents exportateurs de coton», relève S&P.
Le Bénin, le Sénégal, le Mali ou le Burkina Faso, importants exportateurs de coton, ont fait les frais de cette détérioration des prix.
A Madagascar, où la vanille compte pour un tiers des exportations, quand le prix du kilo de vanille est passé de 450 dollars à la fin 2003 à 20 dollars fin 2004, l'impact ne s'est pas fait attendre. Depuis lors, le prix du kilo de vanille oscille autour des 40 dollars.
Impact différé
Le lien entre l'amélioration des balances commerciales de certains pays d'Afrique, comme le Nigeria ou le Cameroun, n'a toutefois pas un impact direct sur une révision positive de la note de ces pays. à court terme, une amélioration de la balance commerciale de ces pays ne débouche pas automatiquement sur un relèvement de leur rating. Par contre, si le profil financier de ces pays continue de s'améliorer sur une longue période, avec, en parallèle, l'accumulation de liquidités venant de l'extérieur sous la forme, par exemple, de réserves en devises étrangères, alors le rating pourra être révisé positivement. Une amélioration de la balance commerciale est un «plus» mais peut induire de nouveaux défis. Ainsi, le Nigeria, de loin le plus important producteur de pétrole de la région, doit faire face à d'abondantes entrées de liquidités, ce qui implique la mise en place d'une politique efficace afin de maintenir la stabilité monétaire du pays. Pour le moment, le gouvernement nigérian maintient la situation sous contrôle, malgré des soucis de corruption, qui risquent de prendre de l'ampleur avec la hausse des standards de vie. à surveiller donc… «Par contre, une dégradation de la balance commerciale d'un pays a une influence immédiate sur la notation du pays», tient à préciser S&P.
K.H.