(l'echo) L'affaire Ioukos n'effraie plus les investisseurs étrangers. Ils sont à nouveau nombreux à se positionner sur la place financière moscovite.Les introductions boursières sont légion et la cherté des prix pétrolierslaisse présager encore des nombreux jours heureux pour les principales capitalisations russes.L'affaire "Ioukos"qui avait amené les investisseurs étrangers à se retirerde la Bourse de Moscou, semble aujourd'hui sortie des mémoires. Pourtant, la main mise gouvernementale sur les secteurs clés de l'économie russe ne cesse de croître.
Ioukos : une affaire classée?
Pour rappel, en 2004, Mikhaïl Khodorkovski principal actionnaire de Ioukos, s'attire les foudres du Kremlin en prenant trop d'indépendance dans un secteur stratégique. Celui du secteur de l'énergie...Et l'homme de tenir tête à Vladimir Poutine. Accusé entre autres d'escroquerie, d'acquisition frauduleuse et de fraude fiscale à grande échelle, Khodorkovskia été condamné à 9 ans de prison et a entraîné Ioukos dans sa chute, la vente forcée de sa filiale Iouganskneftegaz ayant porté un coup quasi fatal au groupe pétrolier. Suite à cette affaire, les investisseurs étrangers avaient fui en masse la place financière moscovite, craignant l'ingérence de l'Etat dans d'autres entreprises clés. Depuis lors, aucune affaire de l'ampleur du scandale "Ioukos" n'a fait la une des journaux, ce qui n'empêche toutefois pas les observateurs de souligner la lente prise de contrôle de l'Etat du secteur énergétique russe.Coup sur coup, on a assisté à la vente forcée de Iouganskneftegaz, la plus rentable filiale de Ioukos au groupe public Rosneft. On a aussi assisté à la reprise d'une participation majoritaire de l'Etat dans Gazprom, le géant gazier, et peu après,au rachat par celui-ci d'une des principales sociétés pétrolières du pays, Sibneft. Ces différentes opérations conférent un droit de regard du pouvoir sur 30% de l'extraction de pétrole en Russie. A l'heure actuelle, la main mise de l'Etat sur les marchés financiers ne semble pas poser problème. Mais des élections présidentielles doivent se tenir en2008 et le successeur de Poutine ne sera peut-être pas aussi «sage».
Cette ingérence du Kremlin sur la place financière moscovite est loind'être négligeable. La capitalisation boursière totale de la Bourse russeest de 942,2 milliards de dollars mais les indices MSCI qui excluent toutes participations de l'Etat qui ne sont pas négociables sur le marché ne prennent en compte qu'une capitalisation de 178 milliards de dollars. Le gouvernement possède pour l'heure 85% des actions Rosneft, plus de 50% des titres Gazpromet presque 64% de Sberbank.
Toujours plus haut
Le nombre conséquent de titres cotésen possession du Kremlin ne semble pas inquiéter outre mesure les investisseurs, nombreux à vouloir profiter des performances del'indice RTS. Depuis le début de l'annéel'indice RTS de la Bourse de Moscou, libellé en dollars US, a engrangé 46% et l'an dernier, ce même indice avait déjà bondi de 87%. La comparaison avec l'indice DJ Stoxx 50, en progression de 5,29% depuis janvier, ou avec le S&P500 en hausse d'à peine 4,48% est evidemment flatteuse pour la Bourse moscovite. Son exposition au secteur de l'énergie n'est pas étrangère à cette performance. La plus importante capitalisation del'indice RTS est Gazprom (pondération de 15%) suivie de près par Lukoil (14,66%). Depuis début janvier,Lukoil a pris 44% et Gazprom, 60%.
Malgré ces cours en nette hausse, le potentiel de croissance des actions russes ne serait pas épuisé. "Nous ne sommes pas surpris par les valorisations étant donné les prix actuels du pétrole et du gaz", indique unanalyste de HSBC Holdings. Le pétrole exporté par la Russie (Pétrole de l'Oural) a vu soncours flamber de 164% sur ces cinq dernières années. "A court terme nous ne sommes pas à l'abri d'une correction, mais à long terme le marché russe devrait surperformer les autres marchés émergents", ajoute-t-il.Tous les analystes ne sont pas aussi positifs envers les perspectives des valeurs russes. Pour certains, la Bourse russe est actuellement sous le coup d'une bulle spéculative qui risque fort de se dégonfler une fois que les prix des matières premièresne tiendront plus leurs promesses.Ce qui fait aujourd'hui la force de la place financière russe pourrait bien être sa faiblesse demain. Sa dépendance envers les prix des matières premières pourrait lui porter préjudice dans le cadre d'un ralentissement économique des Etats-Unis et de la Chine. L'instabilité politique du pays est une autre source d'inquiétude car comme le souligne un analyste, «si tout va pour le mieux actuellement avec la Russie, on ne sait jamais !» Karine Huet. Le pétrole dope la bourse russe. L'affaire Ioukos n'effraie plus les investisseurs étrangers, à nouveau nombreux à se positionner sur la place financière moscovite.
Géant du secteur énergétique russe, soutenu par les autorités en place, Gazprom n'a rien à craindre de la concurrence et a pour ambition de devenir le maître incontesté de l'énergie dans toute l'Europe. Ce qui importe pour les entreprises évoluant dans le secteur des matières premières,c'est leur réserves en ressources naturelles. Or, Gazprom a en sa possession la plus importante réserve de gaz naturel au monde. La production de gaz de l'entreprise reste en outre très modérée par rapport à ses possibilités réelles. Gazprom limite de manière stratégique sa production actuellement en attendant une revalorisation du prix du gaz sur son marché domestique.
Par ailleurs, Gazprom n'a aucun souci d'ordre financier. Le marché des matières premières lui est très favorable et la perspective d'une hausse des prix du gaz en Russie va lui permettre d'encore améliorer son bilan.
«En tenant compte de ces éléments, nous estimons que le juste prix pour l'action Gazprom est de 13,40 dollars», relève les analystes de Finam Investment Company basée à Moscou et conseillant le titre à l'achat. Selon les données compilées par Bloomberg, pas moins de 80% des analystes suivant le titre sont du même avis et recommandent l'action Gazprom à l'achat. Le tout puissant Gazprom ne craint pas la concurrence.