(l'écho) Les investisseurs détenant en portefeuille de tels actifs risquent, en effet, de payer le prix fort après la nette perte de valeur des biens immobiliers US et le nombre croissant de défaillances de paiement enregistrées au niveau des subprime loans.
Selon les données de Merrill Lynch, la dette structurée ayant pour sous-jacent ce type de prêts hypothécaires et dont le volume d'émission 2006 s'élève à pas moins de 450 milliards de USD (contre 95 milliards de USD en 2001), aurait d'ores et déjà perdu 37% de sa valeur. A en croire les estimations de Pacific Investments Management, le gestionnaire du plus grand fonds obligataire au monde, les pertes devraient s'élever à près de 75 milliards de USD!
Victimes
Même si certaines grandes banques comme Morgan Stanley, le plus grand investisseur immobilier de Wall Street, ou Lehman Brothers et Bear Stearns, les plus importants souscripteurs d'obligations hypothécaires, sont évidemment impliquées, force est de constater que les banques ont, via le processus de titrisation, déplacé l'essentiel du risque hypothécaire dans les mains des investisseurs institutionnels comme BlackRock ou AllianceBerstein Holding. Les institutions financières précitées et les organismes spécialisés dans les prêts subprime ont eu très largement recours à ce processus consistant à rassembler les emprunts hypothécaires pour les adosser à un nouveau véhicule financier, un dérivé de crédit, connu sous le nom de Collateralized Mortgage Obligation (CMO), qui est finalement vendu aux investisseurs institutionnels. Ce sont donc eux qui, in fine, supportent le risque ultime lié aux prêts hypothécaires accordés aux ménages disposant d'une qualité crédit peu élevée, voire insuffisante.
Défaillances de paiement en cascade
Si ce mécanisme a permis de trouver les liquidités nécessaires pour permettre aux Américains en situation financière délicate d'accéder à la propriété - 69% des Américains sont propriétaires de leur bien immobilier - il ne pouvait fonctionner qu'à la condition que les prix de l'immobilier continuent à s'accroître. Mais c'était sans compter le cycle de hausse des taux directeurs de la Réserve fédérale US et son impact déflationniste et «récessionniste» sur l'économie. Le durcissement des conditions d'emprunts et son corollaire, la baisse des prix immobiliers, a évidemment heurté en premier lieu les ménages les plus endettés et les plus précarisés.
On en trouve aujourd'hui la manifestation dans la vive hausse des défaillances de paiement dans le chef des créanciers subprime: 13% des prêts hypothécaires à risque contractés en 2006 sont en retard de paiement après 12 mois. Ce qui n'est pas rien lorsque l'on sait que cette catégorie de prêts représentait près de 20% de tous les nouveaux prêts hypothécaires contractés l'année passée. Ce sont, du coup, une cinquantaine de sociétés actives dans ces prêts à risque qui sont aujourd'hui en faillite ou en quasi- faillite.
Pertes de 5,25% à 7,75%
Sachant que deux tiers des emprunts immobiliers ont été titrisés sous la forme d'obligations (soit un encours de plus de 6.000 milliards de USD, ce qui est tout de même 50% plus élevé que l'encours de la dette étatique US!), contre 40% en 1990, on comprend que les détenteurs de ce type de dérivés de crédits se font du mauvais sang.
Si ces véhicules attirent les fonds, surtout européens et asiatiques, qui empruntent dans leurs devises pour investir dans l'immobilier US à risque, c'est qu'ils sont associés à des rendements d'au moins 2 à 3% supérieurs à ceux des prêts considérés comme plus sûrs.
Revers de la médaille, la correction actuelle, qui pourrait voir 23,4 millions d'Américains perdre leur maison, laisse entrevoir, selon Standard & Poor's, des pertes de 5,25% à 7,75% pour les détenteurs de dettes adossées aux prêts hypothécaires US. Luc Charlier