A ce jour, les possibilités de recours sont très limitées. En dépit des requêtes émanant notamment de la profession dentaire elle-même, le législateur n’a pas créé d’ordre professionnel pour les dentistes à l’instar de celui des médecins ou des pharmaciens. "Voilà déjà 30 ans que le projet de création d’un organisme déontologique multidisciplinaire pour tous les professionnels de la santé n’ayant aucun ordre (kinésistes, infirmiers, dentistes,…) est sur la table, déplore Michel Devriese, président de la société de médecine dentaire. En outre, si les grands principes sont identiques pour tous, il faudra tenir compte des spécificités (techniques notamment) liées à chaque profession", insiste-t-il.
Le patient qui s’estime lésé peut en théorie s’adresser à divers organismes — Commissions Médicales Provinciales, associations de dentistes, service d’évaluation et de contrôle de l’INAMI -. De son côté, le service de médiation fédéral "Droits des patients" pourra écouter et aider, mais il ne sera pas compétent pour trancher. "Les dossiers dentaires étant en général très techniques et spécifiques, la médiatrice qui n’a aucun expert à sa disposition, ne sera évidemment pas apte à poser un jugement", poursuit Michel Devriese. Et puis tout cela reste très institutionnel…
Saisir le Fonds des accidents médicaux n’est pas forcément une solution non plus. Pour prétendre à une indemnisation dans ce cadre, il faut en effet avoir subi un préjudice "suffisamment grave" (invalidité permanente d’au moins 25%, incapacité temporaire de travail de 6 mois, troubles particulièrement graves — y compris d’ordre financier — dans la vie privée et décès). "Or, il est peu probable que des problèmes dentaires dégénèrent à ce point", souligne le responsable de la société de médecine dentaire.
Si à l’issue de son enquête, le Fonds estime que le dommage résulte d’une faute du prestataire, il l’invitera à proposer une indemnisation à la victime. Si le prestataire n’est pas ou insuffisamment assuré, le Fonds interviendra malgré tout.
Le patient peut limiter les risques…
L’absence d’un ordre professionnel est donc clairement le "chaînon manquant". Mais si les prestataires de soins doivent mettre de l’ordre dans leurs pratiques pour garantir un minimum qualitatif et organiser une médiation efficace, de son côté, le patient peut aussi éviter les comportements à risque, estime Michel Devriese. "Beaucoup de patients négligent de passer par les cases prévention et dépistage. Lorsqu’un problème survient, ils se retrouvent souvent face à des soins conséquents et à des devis onéreux. Ils cherchent alors notamment sur internet, via des forums ou à l’étranger des solutions à moindre coût qui se révèlent en général peu qualitatives et peu durables, voire hasardeuses."
Ce shopping médical débouche rarement sur des traitements satisfaisants. S’en suivent inévitablement des désillusions, voire des complications et donc des plaintes. Dans ces cas-là, il est d’autant plus difficile de reconstituer "l’historique" des soins et de dégager des responsabilités. Sans compter que le nomadisme des patients coûte cher en soi: il implique à chaque fois de tout reprendre à zéro et donc de multiplier inutilement les examens, les radios, et les traitements. Et in fine, les coûts!