Mardi, BNP Paribas Fortis, le leader du marché de l’épargne, a annoncé une baisse du rendement global annuel de la plupart de ses comptes d’épargne à 0,11%, le minimum légal. Ce n’est qu’une question de temps pour que les autres grandes banques s’alignent sur ce taux plancher. Immédiatement après l’annonce de mesures pour réveiller l’inflation et la croissance économique par la Banque centrale européenne le 10 mars dernier, presque toutes les grandes banques belges se sont lancées dans un plaidoyer en faveur de l’abandon de ce taux minimum.
Avec un taux d’à peine 0,15% sur la plupart des comptes d’épargne classiques, les Belges s’appauvrissent chaque mois. Avec une inflation de 2,24% en mars, la Belgique fait exception dans la zone euro, où l’inflation moyenne se monte à -0,2% (en février).
En France et aux Pays-Bas, les banques offrent des taux plus élevés. Il n’est pas rare de trouver un taux de 0,75% en France, et de 1% aux Pays-Bas. Par ailleurs, ces taux sont pratiqués par des banques actives chez nous, comme ING et Argenta.
Dès lors, pourquoi ne pas y transférer (une partie de) nos économies? La libre circulation des capitaux étant un des principes fondamentaux de l’Union européenne, cela devrait être simple comme bonjour. En réalité, les choses sont plus complexes. "Pour ouvrir un compte en ligne chez Argenta aux Pays-Bas, il faut résider dans le pays. En tant que résident belge, il n’est donc pas évident d’ouvrir un compte aux Pays-Bas", explique la porte-parole d’Argenta, Caroline Ghekiere. Nous obtenons la même réponse chez ING aux Pays-Bas.
La fiscalité est un obstacle
Même un épargnant qui franchit cet obstacle et parvient à ouvrir un compte doit être conscient des formalités – essentiellement d’ordre fiscal – qui vont de pair avec l’ouverture d’un compte à l’étranger.
Par exemple, il faudra cocher sur la déclaration fiscale la case indiquant que l’on détient un compte à l’étranger. L’épargnant devra fournir les données de ce compte au Point de Contact Central (PCC), qui est intégré à la Banque Nationale de Belgique. En plus de l’identité du titulaire et des données concernant le compte, l’épargnant devra également mentionner la date d’ouverture du compte.
Ces formalités ne concernent pas les comptes en Belgique, car les banques belges communiquent ces informations une fois par an au PCC. Il s’agit entre autres du numéro de compte et du nom du titulaire. Mais aucune information n’est fournie quant au montant détenu sur ces comptes. Le fisc peut consulter le PCC dans des cas exceptionnels, mais en général, il n’y a pas accès.
Il en va bien autrement des comptes détenus à l’étranger, pour lesquels l’administration fiscale reçoit des informations beaucoup plus détaillées. À partir de cette année, les banques devront fournir les données de leurs clients étrangers à leur administration fiscale locale, qui, à son tour, les communiquera au fisc du pays de résidence du client.
En d’autres mots: le fisc belge aura à sa disposition toutes les données des épargnants titulaires d’un compte bancaire à l’étranger. Ces informations ne sont pas limitées au (x) numéro(s) de compte, mais comprennent également les soldes de ces comptes et les intérêts perçus.
En marge de ces formalités, la question est de savoir si ces comptes étrangers rapportent réellement plus. En Belgique, presque tous les comptes d’épargne sont des comptes réglementés, qui bénéficient d’une exonération de précompte mobilier à concurrence de 1.880 euros. Avec un taux de 0,15%, cela signifie que vous ne commencerez à payer le précompte mobilier que si vous détenez plus de 1,25 million d’euros sur votre compte d’épargne. Pour ce qui ne dépasse pas cette somme: le brut = le net.
À l’étranger, les choses sont beaucoup plus complexes. "En France et aux Pays-Bas, l’Etat ne retient pas de précompte à la source. En principe, une exonération s’applique, mais uniquement si le contribuable peut démontrer que le compte d’épargne étranger répond aux conditions applicables aux comptes d’épargne réglementés. Dans le cas contraire, il devra payer 27% de précompte mobilier", prévient Erik Sansens, spécialiste en fiscalité de l’épargne internationale.