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Comment échapper à la taxe sur les comptes-titres

Les actions nominatives, la branche 23, l’immobilier et l’art sont vus comme des alternatives aux comptes-titres, avec cependant quelques contraintes.
©Vincent Dubois

Les comptes-titres de plus de 500.000 euros vont être taxés à 0,15%, suite à l’accord du gouvernement de Charles Michel sur une série de réformes structurelles. Le prélèvement se fera par le secteur bancaire, sauf pour les comptes-titres détenus à l’étranger, qui doivent être indiqués dans la déclaration fiscale et n’échapperont pas à cette taxation.

Tout investisseur qui détient un ou plusieurs comptes-titres dont le total des actifs dépasse 500.000 euros subira le prélèvement. La valeur totale du compte-titres sera enregistrée chaque mois et en fin d’année. L’institution financière réalisera la moyenne et appliquera ou non la taxe. Tout dépendra de l’évolution, incertaine, des titres présents dans le portefeuille de l’investisseur.

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Pour éviter de payer cette taxe, plusieurs alternatives existent, mais elles présentent des inconvénients à côté de leurs avantages.

"Rien ne change pour le client avec un contrat d’assurance, sauf qu’il n’est plus taxé comme sur un compte-titres."

désiré Godfroid
administrateur délegué de Patrimonia

De plus, le ministre des Finances Johan Van Overtveldt a prévenu que des dispositions anti-abus vont être adoptées pour éviter que des investisseurs soient tentés de contourner la taxe, en répartissant par exemple leurs avoirs sur le compte-titres de leur épouse ou leurs enfants. Multiplier les comptes-titres pour y maintenir des montants inférieurs à 500.000 euros sera considéré comme de la fraude fiscale.

Mise au nominatif

Mais le ministre Johan Van Overtveldt avait indiqué que les actions nominatives, "qui n’ont pas de valeur objectivable", ne sont pas concernées par cette taxation. Des sociétés cotées comme Solvay et Engie indiquent sur leur site qu’elles peuvent inscrire dans leur registre les titres nominatifs des actionnaires, après leur inscription. Se tourner vers les titres nominatifs pourrait permettre d’échapper à la taxe sur les comptes-titres.

"Une taxe pas perturbatrice"

Vincent Van Dessel, le président d’Euronext Bruxelles (l’opérateur de la Bourse de Bruxelles), souligne qu’il lui est difficile de donner un commentaire sur un "texte de loi pas encore connu, car les détails sont extrêmement importants". Mais il reconnaît que la baisse de l’impôt des sociétés voulue par le gouvernement "est un signal extrêmement positif à l’international surtout avec le BrexitC’est la mesure la plus importante".

Par contre, le relèvement de la taxe sur les opérations de Bourse, à 0,35% pour les actions, s’avère selon lui "un record mondial". "En l’absence d’une taxation sur les plus-values, le relèvement de cette taxe s’apparente à une taxe sur la spéculation cachée, indique-t-il. En augmentant les frais, il y devrait y avoir moins de transactions, mais je ne m’attends pas à un effet important, car la taxe reste simple et droite. Je ne prévois pas de perturbation pour le marché", prédit-il.

Pour la taxe sur les comptes-titres, que Vincent Van Dessel considère comme une taxe sur la fortune, "on va voir des effets à long terme. À court terme, cette taxe n’aura pas d’effet. Les détails de cette taxe sont extrêmement importants, car il faut voir dans quelle mesure les investisseurs vont être guidés vers des produits qui ne seront pas soumis à la taxation. En matière financière, le comportement de l’investisseur est immédiat face à l’effet de la taxation, indique-t-il. Une taxe de 0,15% sur les comptes-titres de plus de 500.000 euros est une mesure à la base intelligente, mais je regrette qu’il n’y ait pas de plafond en fonction des montants. En Suisse et au Luxembourg, il existe un impôt sur la fortune, mais il y a un forfait. Sans limite, cette taxe risque de créer des mouvements dans les portefeuilles pas prévisibles, car on ne connaît pas les détails de cette taxe. Mais ce signal d’une taxation sur la fortune n’est pas bon, même si ce ne sera pas perturbateur".

Sauf que, comme l’indique Pierre-Philippe Hendrickx, avocat chez Nibelle & Partners, "si vous voulez vendre vos actions nominatives à quelqu’un qui veut vous les acheter, il vous faudra faire une démarche vis-à-vis du registre de la société pour demander une procuration et l’enregistrement dans le registre. Je ne suis pas sûr que les sociétés veulent que ce que genre de manipulation se reproduise. Par contre, si vous êtes un actionnaire de référence d’une société comme Bekaert, et que vous ne voulez pas vous livrer à des manipulations sur le registre des titres de la société en ne vendant pas vos titres, vous pouvez inscrire votre participation dans celui-ci. Encore faut-il que votre participation ne fasse pas partie d’un holding, qui n’est pas visé par la taxation. Un compte-titres est facile à gérer. La mise au nominatif des actions de sociétés cotées demande par contre un certain nombre de manipulations. Alors, je ne suis pas sûr que pour éviter la taxe de 0,15%, les gens vont vouloir passer par le nominatif. Pour des titres détenus à long terme, la mise au nominatif est un moyen d’éviter cette taxe, mais par exemple, si vous détenez pour 1,5 million d’euros de titres dans votre portefeuille, et décidez de mettre 1 million d’euros dans 3 ou 4 sociétés au nominatif, il vous reste 400.000 euros sur votre compte-titres, qui peuvent être taxés." Les titres au nominatif sont donc moins facilement échangeables que des actions sur un compte-titres, au à l’instar d’autres placements comme l’immobilier ou l’art, échappant eux aussi à la taxation de 0,15%.

L’option assurance

Désiré Godfroid, administrateur délegué de Patrimonia, souligne qu’il est possible de transférer son compte-titres vers un contrat d’assurances de la branche 23. Il explique qu’une banque privée peut transférer le portefeuille de titres de ses clients vers des contrats d’assurances de la branche 23, "pour autant qu’elle dispose d’un agrément de courtier d’assurances" où le gestionnaire de ce portefeuille continue de faire son travail. "Rien ne change pour le client, sauf qu’il n’est plus taxé comme sur un compte-titres" indique-t-il. Le transfert coûte cependant 2% de taxe d’opération d’assurance, "qui peut être étalée, voire réduite, en fonction de la compagnie d’assurances", selon lui.

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Le gouvernement a confirmé que l’épargne-pension et les assurances-vie, notamment les assurances de la branche 23, restent en dehors du champ d’application de la taxe sur les comptes-titres. Désiré Godfroid souligne qu’outre cet aspect, le contrat d’assurance de la branche 23 présente un autre avantage: la taxe sur les opérations de Bourse (relevée à 0,35% pour l’achat et la vente d’actions et 0,12% pour l’achat et la vente d’obligations) disparaît, tout comme le précompte mobilier de 30% qui touche les dividendes distribués par les sociétés mais aussi la plus-value obligataire des fonds mixtes. L’administrateur délégué de Patrimonia s’est livré à une comparaison entre un portefeuille de titres détenus à travers un contrat d’assurance de la branche 23 et à travers un compte-titres pour une valeur équivalente d’un million d’euros, investi à 50% en actions et 50% en obligations. Après 5 ans, et une performance fictive de 5%, ce portefeuille aurait rapporté 1,20 million d’euros en contrat d’assurances et 1,14 million d’euros par comptes-titres, après frais et taxes.

"Le contrat d’assurances branche 23 présente un autre avantage pour les actions de sociétés étrangères comme Google ou Total. Ces sociétés prélèvent une fois le précompte dans leur pays, puis en Belgique. Vous vous retrouvez avec un double précompte qui peut monter à 50%. Avec le contrat d’assurances, vous évitez cette double imposition car vous récupérez 15% de précompte à la source et vous ne payez pas le précompte mobilier en Belgique", souligne Désiré Godfroid.

Selon lui, "un gros mouvement va s’opérer vers les assurances. Je pense que les banques privées vont développer leur pôle assurances. En France, 85% à 90% des personnes investissent à travers un contrat d’assurances. Ici, ça arrive", prédit-il.

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