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500 euros non taxés par mois… Mais pas pour tout le monde

Vous avez une petite activité sur le côté? Le gouvernement vous autorise maintenant à gagner 500 euros sans être taxé sur ce gagne-pain.
La mesure s'appliquera, entre autres, aux chefs d'orchestres.
La mesure s'appliquera, entre autres, aux chefs d'orchestres. ©IMAGEGLOBE

- Qui est concerné? À partir du 1er janvier 2018, les personnes qui travaillent (dans le cadre d’une activité principale d’au moins un 4/5e) et les pensionnés pourront disposer de revenus complémentaires non taxés allant jusqu’à 500 euros par mois. Il s’agit donc d’une exonération fiscale de 6.000 euros par an.

Quelles activités sont couvertes? Le gouvernement fait mention du travail récréatif dans des fonctions spécifiques du secteur non marchand. Il indique également que la mesure s’appliquera aux services de particulier à particulier. Mais aucune liste précise des activités autorisées n’a encore été transmise. Dans un communiqué de presse, Maggie De Block, la ministre des Affaires sociales (Open Vld), donnait quelques exemples: coach sportif, chef d’orchestre, accueil extra-scolaire des enfants, gardes-malades de nuit. "En résumé, il s’agit de la zone grise existant entre le volontariat et le travail rémunéré." L’objectif de cette mesure est donc bien de régulariser des revenus. "L’État ne peut pas entretenir cette zone grise, je comprends donc cette idée de régularisation mais la solution choisie n’est pas la bonne", juge l’économiste Etienne de Callataÿ (Orcadia).

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L’indépendant complémentaire va-t-il en profiter?

Le gouvernement a choisi de créer un nouveau régime particulier pour les personnes qui ont une activité complémentaire. Mais il existe déjà un régime qui va dans ce sens: il s’agit du statut d’indépendant complémentaire. Celui-ci va-t-il aussi pouvoir profiter des 500 euros exonérés? Revenons sur l’exemple du coach sportif. S’il donne cours dans une association, le revenu issu de cette activité entre dans la facture des 500 euros puisqu’il s’agit du secteur non marchand. Mais s’il donne cours dans une salle de sport, ce n’est plus du non-marchand. Donc, dans ce cas-là, il peut oublier l’exonération. Mais s’il donne cours à un particulier? S’agit-il d’un service de particulier à particulier? Les cabinets ministériels, en vacances, n’ont pas pu apporter d’éclairage. Mais on comprend que la limite est ténue. L’Unizo, qui défend les indépendants, dénonce cette différence de traitement entre les particuliers qui bénéficieront d’exonérations et les indépendants qui paient des charges. L’association flamande parle de concurrence déloyale.

"Cette mesure pose un problème de discrimination et un risque d’abus, voire de fraude."

Edoardo traversa
économiste à l’UCL

L’État va-t-il perdre de l’argent?

Par définition, les 500 euros exonérés ne rapporteront pas de recettes à l’État. Mais va-t-il en perdre? Ce flou autour de la nature des activités et l’exonération plutôt généreuse proposée – 500 euros net par mois, ce n’est pas rien – va, à coup sûr, pousser les adeptes de l’ingénierie fiscale à s’engouffrer dans la brèche et à reconsidérer leurs revenus. L’économiste Edoardo Traversa (UCL) pointe un risque d’abus, voire de fraude. "On pourrait assister à du spliting salarial. Les personnes vont estimer qu’une part de leurs revenus est accessoire et donc exonérée. Comment cela va-t-il être vérifié?" s’interroge-t-il. Par cette requalification de revenus, moins d’impôts seraient perçus. Ce qui signifie moins de recettes pour la sécurité sociale.

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Pourquoi ne pas exonérer tout le monde?

Les meilleures solutions ne sont-elles pas les plus simples? C’est ce que défendent plusieurs économistes. "Il faut vraiment arrêter avec ces régimes d’exception pour tout et n’importe quoi. Le Code des impôts devient illisible", s’énerve Philippe Defeyt, de l’Institut pour un développement durable (IDD). Il estime qu’un revenu égale un revenu. "Dès lors, pourquoi ne pas augmenter la quotité exonérée d’impôt pour tout le monde?" Étienne de Callataÿ pense aussi que cette mesure serait plus équitable. L’UCM aurait également préféré cette solution. Mais le fait que cette mesure profite à tous les contribuables la rend bien évidemment coûteuse. Ce qui explique sans doute pourquoi le gouvernement n’a pas tranché dans ce sens.

Va-t-on vers un modèle à l’américaine?

La mesure pose aussi une question de fond. Le gouvernement doit-il pousser vers une société dans laquelle les individus multiplient les boulots? Pour l’économiste Bruno Colmant (Degroof Petercam), la mesure doit certainement s’affiner mais il estime qu’elle a le mérite de coller à la nouvelle réalité du monde du travail. "C’est une forme de reconnaissance des libertés individuelles. On permet aux gens d’avoir une deuxième ou une troisième activité. À New York, cela fait des dizaines d’années que cela se passe ainsi", dit-il. Le modèle américain est-il à envier? C’est un débat idéologique. Pour les syndicats, c’est une dérive de la société. "Derrière cette mesure qu’on nous présente comme positive, se cache un gouvernement qui se décharge de ses responsabilités. Au lieu de mener une politique salariale et de pension convenable, il met en place toute une série de systèmes pour dire aux gens: c’est à vous d’arrondir vos fins de mois et tant pis pour vous si vous n’en êtes pas capables", critique Robert Vertenueil, le secrétaire général de la FGTB.

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