Dans ce pays, on ne sait plus comment décider
On dit qu’on va faire, mais on ne fait pas. Plus le temps passe, plus l'incompréhension et le malaise grandissent. Prenez garde, leaders politiques...
Était-ce fondé de fermer en bloc tous les cinémas et les théâtres du pays pour enrayer la nouvelle vague de Covid-19? On attend toujours le décideur qui nous expliquera dans le blanc des yeux les raisons profondes de ce choix si peu convaincant.
À peine prise, la mesure était regrettée, déplorée et même jugée incompréhensible par des ministres dont certains avaient pourtant pris part au comité de concertation dont elle est issue. Traduction, ce comité ne fait pas dans la concertation, mais dans l’opposition. Codeco, comme comité des conflits.
Qu’une autorité démocratiquement élue prenne des décisions, c’est tout ce qu’on attend d’elle, a fortiori en période de crise sanitaire. Mais après autant de mois, c’est toujours l’impro de dernière minute, le bras de fer, le marchandage. À quoi sert la belle expertise médicale et scientifique made in Belgium si c’est pour s’en passer au moment où elle serait la plus utile?
Même quand il n’y a pas urgence, on parvient à prendre des décisions qui n’en sont pas. On l’a vu avec l’autre grand thème politique de la semaine, le nucléaire. La fin de l’atome a été votée en 2003, mais on n’a jamais développé une stratégie qui permette de passer du principe aux actes. On a dit qu’on allait se passer de l’atome mais, dix-huit ans plus tard, on ne sait toujours pas comment. Or, sans exécution valable, une décision ne rime à rien. Avec le temps, la sortie du nucléaire est devenue une mauvaise blague, puis un bourbier sans nom.
Prenez garde, leaders politiques, si vous ne remettez pas la raison et l’intérêt général au centre, la suite n’aura rien d’un conte de Noël.
Comment assurer dans la durée une énergie suffisante, abordable et propre? La réponse à cette question à la fois fondamentale et complexe ne se trouve pas au bout d’une nuit de négos. Pour y répondre, il faut du calme, de la clarté dans les idées grâce à une expertise objective et documentée, le sens du long terme et de l’intérêt général. On n’a rien vu de tout cela. Alors, forcément, la seule décision possible était de reporter la décision.
C’est le même refrain infernal pour les autres grands enjeux du moment. La fiscalité est dépassée et contre-productive en Belgique? On dit qu’on va faire une grande réforme fiscale, mais on n’ose pas. Le nombre de personnes à l’emploi est trop faible? On dit qu’on va y remédier, mais on ne prend que des mesures à la marge. La planète brûle? On dit qu’on va vers la neutralité carbone, mais on ne sait pas comment.
On gesticule, on s’énerve mais, manifestement, on ne sait plus comment décider dans ce pays. On dit qu’on va faire, mais on ne fait pas. Plus le temps passe, plus l'incompréhension et le malaise grandissent. Prenez garde, leaders politiques, si vous ne remettez pas la raison et l’intérêt général au centre, la suite n’aura rien d’un conte de Noël.