Édito | Chez Proximus, le politique doit savoir ce qu'il veut
Ce mardi, le Parlement fédéral a demandé des comptes au CEO de Proximus. L'exercice est indispensable. Mais pour être audible, le pouvoir public doit garder une ligne cohérente dans sa critique.
Ce mardi, pendant près de trois heures, Guillaume Boutin, le CEO de Proximus, a expliqué en long et en large ce qu'il faisait à la tête de l'opérateur semi-public et pourquoi. Bien que l'exercice soit fréquent pour le patron, l'audition avait, cette fois, davantage des airs d'examen oral que d'une présentation de mise à jour.
Il est vrai qu'au niveau boursier, le bulletin de monsieur Boutin n'est pas terrible. Même si les autres élèves du marché européen des télécoms ne font pas beaucoup mieux, Proximus reste parmi les plus mauvais, avec une chute de sa valorisation boursière de 75% en cinq ans.
Rendre des comptes était donc nécessaire. Il est d'ailleurs rassurant de voir que l'actionnaire principal mette les mains dans le cambouis stratégique et souhaite comprendre où l'entreprise souhaite aller. Ce rôle de contrôleur est indispensable et ne doit pas être remis en cause.
Mais le rôle de chien de garde public ne doit pas non plus pousser à mordre à tout va et surtout, sans une certaine cohérence. Rappelons que toute cette séquence a débuté par l'attaque du président du MR. En octobre dernier, il critiquait ouvertement la stratégie du CEO. Trois mois plus tôt, le même Georges-Louis Bouchez assurait que si Proximus avait une stratégie, c'était grâce à la vision du monde des médias de son patron.
L'autre critique qui a poussé Guillaume Boutin à venir s'exprimer concernait sa reconduction à son poste de CEO. La décision prise cet été en affaires courantes a fait grincer des dents. Elle a pourtant été prise à l'unanimité par le conseil d'administration. Rappelons qu'il est composé de 14 administrateurs dont sept sont proposés par les partis au pouvoir.
Face aux multiples critiques, Guillaume Boutin est dans une position délicate: remettre les points sur les i sans perdre la confiance de son principal actionnaire.
Face aux multiples critiques, Guillaume Boutin est dans une position délicate: remettre les points sur les i sans perdre la confiance de son principal actionnaire. Et tant pis si dans le tas, un parti plaide pour un meilleur dividende, un autre pour un cash-flow plus généreux et qu'un troisième souhaite avant tout protéger le consommateur d'une hausse de prix trop importante. "Nous sommes au milieu de tout ça et nous devons proposer une stratégie équilibrée", a expliqué le CEO durant son intervention. Une chose est sûre, même si l'exercice est complexe, ne pas écouter les attentes, même très variées, de son actionnaire, risquerait bien de le placer sur un siège éjectable. Ses prédécesseurs Didier Bellens et Dominique Leroy en savent quelque chose.
Le CEO de Proximus doit évidemment tenir compte de l'avis de son actionnaire majoritaire. Mais celui-ci doit aussi savoir ce qu'il veut: soit conserver ses parts dans Proximus et y jouer un vrai rôle moteur et constructif via le CA. Soit laisser tomber sa participation majoritaire et donc une partie de son pouvoir d'influence.
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