Les limites des taux négatifs

Une petite banque allemande qui va faire payer ses clients particuliers pour leurs dépôts, un grand assureur qui place du cash dans des coffres, des grandes banques qui réfléchissent à faire de même… Le monde financier tourne visiblement à l’envers depuis que la Banque centrale européenne (BCE) a placé son taux de dépôt en territoire négatif. Or ce taux, aujourd’hui à -0,4%, pourrait encore baisser. Attention, danger!

À Francfort, la Deutsche Bank a tenté hier de rassurer ses clients, en indiquant qu’elle n’entendait pas suivre l’exemple d’une petite banque coopérative bavaroise qui a annoncé l’instauration de taux négatifs sur les dépôts de plus de 100.000 euros. Cette mesure ne concernerait que 140 clients privés, mais elle n’en a pas moins une portée psychologique non négligeable. Car jusqu’ici, les taux négatifs concernaient les dépôts des entreprises.

En Belgique, le taux d’intérêt sur les livrets d’épargne ne peut pas passer légalement sous le niveau de 0,11%. Mais on connaît les pressions de certains banquiers pour répercuter plus largement la politique de taux de la BCE. Globalement, dans le monde bancaire, on ne reste d’ailleurs pas les bras croisés face à cette politique. Pour éviter les pénalités de la BCE, certaines grandes banques, comme la Commerzbank, étudient la possibilité de conserver leur cash… dans des coffres. C’est d’ailleurs ce que l’assureur Munich Re vient de tester pour quelque 10 millions d’euros.

Il est évident qu’une telle situation est totalement anormale, tout en comportant des risques.

Une récente note du FMI souligne que les taux négatifs ont certes contribué à une modeste expansion du crédit dans la zone euro. Mais les pousser davantage en territoire négatif risque de faire plus de mal que de bien, notamment pour la rentabilité des banques. Sans compter le risque de voir les épargnants retirer leurs avoirs des institutions financières. On ne peut pas imaginer que la BCE poursuive un tel objectif.

L’institution de Francfort devrait donc plutôt donner la priorité à l’instrument des rachats d’actifs. Et plus tôt les taux d’intérêt reviendront à "la normale", mieux ce sera.