Mercosur: l'agriculture ne peut prendre l'Europe en otage

Rédacteur en chef adjoint

La présidente de la Commission européenne a signé l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur. La question maintenant n’est pas de le rejeter ou non, mais plutôt : avons-nous le choix ?

La coïncidence n’a échappé à personne. La France perd son gouvernement et s’enfonce dans la pire crise de la Cinquième République. Le surlendemain, Ursula von der Leyen s’envole vers Montevideo pour y signer un accord honni dans l’Hexagone. Après près d’un quart de siècle d’une gestation mouvementée, le traité de libre-échange de l’Union avec les pays du Mercosur est né, au grand dam des Français et de tous les autres opposants à l’accord.

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Ces opposants ont d’ailleurs raison de dire que le stylo de la présidente de la Commission n’a fait qu’inscrire la conclusion politique des négociations. L’accord aura besoin du vote des capitales européennes et des eurodéputés, et une minorité de blocage pourrait apparaître si l’Italie, la Pologne voire d’autres comme les Pays-Bas, l’Autriche et l’Irlande s’associent à la position française. Des pays où l’agriculture donne de la voix, le secteur le plus exposé aux termes de l’accord.

Pourtant, l’Europe a-t-elle le choix ? Pas vraiment. N’en déplaise aux agriculteurs.

Quand la Chine domine les marchés de matériaux stratégiques, quand Donald Trump se barricade derrière ses frontières, l’Europe n’a pas le choix: elle doit trouver d’autres partenaires.

Nous ne pouvons plus nous payer le luxe d’écarter un marché de 250 millions de consommateurs. L’économie du Vieux continent affiche des signaux de détresse de plus en plus alarmants. En Belgique, une vague de licenciements collectifs se profile à l’horizon, suivant de près les spectaculaires annonces en Allemagne et les prévisions déprimantes venant d’une France paralysée politiquement. Ce sont là, rappelons-le, les locomotives de l’Europe et nos deux principaux partenaires commerciaux.

Quand Trump se barricade

Mais il y a plus. Le Brésil détient 20% des réserves mondiales de graphite, incontournable pour notre énergie décarbonée, l’Argentine un tiers des réserves de lithium, indispensable pour nos batteries. Manganèse, nickel, terres rares… l’Amérique Latine regorge de matériaux stratégiques que l’Europe, densément peuplée, rechigne à extraire de son propre sol. Quand la Chine domine ces marchés, quand Donald Trump se barricade derrière ses frontières, l’Europe n’a pas le choix: elle doit trouver d’autres partenaires.

Et si l’agriculture ne peut prendre tout le continent en otage, elle doit pouvoir être entendue, exiger de travailler sur des clauses miroirs, sur la réciprocité dans les normes, installer des garde-fous en cas de débordement sur nos marchés, voire obtenir des compensations.

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Cet accord avec le Mercosur est certes imparfait, mais nous devons nous en accommoder. Il montre surtout l’urgence d’une véritable autonomie stratégique, d’une politique industrielle ambitieuse et d’une protection sans faille de nos agriculteurs et singulièrement les plus exposés d’entre eux. En résumé, nous devons passer d’une globalisation béate à une globalisation stratégique et opportuniste.

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