Une dispute pour rien
Le débat sur la réforme de la Constitution.
La bagarre politique autour d’une liste d’articles de la Constitution à réviser est le prototype même d’une poussée de fièvre préélectorale sans intérêt. Soyons clairs: l’adoption de cette liste n’entraîne nullement une aventure institutionnelle automatique. Et l’absence d’articles à réviser n’empêche pas une réforme de l’Etat, beaucoup de modifications importantes pouvant être adoptées à coups de lois spéciales. Tout dépendra en fait, après les élections, de la volonté des acteurs politiques et du rapport de forces entre eux.
Dans un Etat fédéral "normal", une réforme de la Constitution relève d’un exercice démocratique sain. Mais la Belgique n’est pas un Etat fédéral "normal". Il est gangrené par des velléités séparatistes en Flandre et celles-ci font peser de lourdes suspicions sur ce débat.
Refuser le débat institutionnel n’a jamais fait reculer le séparatisme.
En période électorale surtout, il est de bon ton que les partis francophones s’affichent "demandeurs de rien" sur le plan institutionnel, par crainte d’ouvrir la fameuse "boîte de Pandore". Sauf que, de facto, celle-ci est ouverte depuis belle lurette… Jamais les postures matamoresques d’avant scrutin n’ont empêché une réforme de l’Etat par la suite. Refuser le débat institutionnel n’a jamais fait reculer le séparatisme.
En outre, qui peut nier que la machine Belgique, avec son entrelacs de compétences et ses strates d’institutions superposées, ne fonctionne pas (toujours) de manière optimale? Oui, remettre de l’huile dans les rouages de cette machine peut être utile. Et non, cela ne signifie pas nécessairement la démanteler.
Les francophones ont tout intérêt à se préparer, calmement et intelligemment, aux prochaines revendications flamandes et à discuter avec les partis qui, au nord du pays, croient encore au fédéralisme. Jusqu’à preuve du contraire, ceux-ci restent d’ailleurs majoritaires. À cet égard, les propositions d’Ecolo et Groen pour Bruxelles (un seul exécutif, transfert de compétences communales vers la Région, fusion progressive des zones de police…) vont dans le bon sens et sont un bel exemple de ce qu’un dialogue apaisé peut produire au bénéfice de tous.