Une question d'équilibre

Solidarité: "relation entre personnes qui entraîne une obligation morale d’assistance mutuelle. Sentiment qui pousse à assister autrui". Voilà ce que dit le Robert. Solidarité. C’est ce qui fonde l’action des syndicats. C’est ce principe qui est censé guider les manifestants qui, aujourd’hui, défileront contre la réforme des pensions du gouvernement Michel. Certaines de leurs craintes sont légitimes, comme celle d’une réforme qui mènerait petit à petit à une privatisation des pensions. Le 1er pilier existe, et doit être maintenu et assuré.

Mais en combattant cette réforme, les syndicats empêchent aussi que se noue une vraie solidarité au sein de ce 1er pilier. Car la réforme des pensions, c’est aussi cela. Une harmonisation des règles entre trois régimes de pensions. Des règles qui, telles qu’elles étaient rédigées, menaient à des déséquilibres flagrants.

35% du budget des pensions est mangé par les fonctionnaires, alors qu’ils ne représentent que 19% des pensionnés. Les indépendants, eux, reçoivent une part de gâteau équivalent à 8% du budget pension, alors qu’ils représentent aussi 19% des pensionnés… Un déséquilibre qui frappe au portefeuille: un indépendant touche en moyenne 800 euros de pension, un salarié 1.100 euros, un fonctionnaire… 2.400 euros. La réforme des pensions vise à rééquilibrer les choses. Rétablir une certaine équité. Les indépendants vont y gagner. Clairement. On ne les verra pas dans la rue ce matin.

Un grand nombre de fonctionnaires vont y perdre. Leur pension n’évoluera plus comme par le passé. Ils devront travailler quelques années de plus, jusque 63, 64 ans. Dans certaines fonctions, ce sera compliqué. Pour cela, les syndicats ont raison de se battre pour la prise en compte de la pénibilité. Mais pour rappel, l’âge moyen de départ à la pension d’un indépendant est déjà de 63 ans… Et beaucoup font aussi un métier pénible.

Ces fonctionnaires, ce sont eux que l’on verra en masse dans la rue ce matin. Ils viendront y défendre certains privilèges. Mais pas toujours la solidarité.