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“Mon regard extérieur fait de moi une CEO atypique dans le cyclisme”

La carrière de Yana Seel, CEO de l'équipe cycliste kazakhe du World Tour Astana-Premier Tech, a débuté lorsque ses parents l'ont envoyée en Belgique pour ses études. “J'ai décroché trois diplômes et engrangé 10 années d'expérience professionnelle. C’est alors qu’on m'a proposé de devenir CEO dans un secteur dont je ne connaissais rien.”

Après une formation en technologie de laboratoire pharmaceutique et biomédicale à l'université de Gand, Yana Seel suit des cours de gestion d'entreprise et de marketing et vente. Puis elle occupe durant 10 ans des postes de marketing et de gestion dans l'industrie pharmaceutique. En 2018, elle retourne au Kazakhstan pour travailler en tant que freelance pour le gouvernement. Elle entre alors en contact avec plusieurs stakeholders de l'équipe cycliste Astana, qui l’invitent à procéder à une analyse de son business model. L'une des recommandations qu’elle formule est de nommer un CEO qui se concentrerait uniquement sur la gestion. Aux yeux de Yana Seel, en effet, une équipe cycliste doit être gérée comme une entreprise et viser la stabilité financière. Et quelque temps plus tard, elle se voit proposer ce poste de CEO.

Qu'est-ce qui vous attire dans cet emploi?

“J'ai été moi-même gymnaste mais j'ai dû arrêter au moment où j'étais prête à passer à un niveau supérieur. Je le regrette encore! Le sport m'attire toujours, cependant. Et cette équipe recherchait quelqu'un qui ose prendre des décisions claires avec un regard extérieur et objectif. Quelqu'un qui se laisse guider par les faits, sans être ‘gêné’ par une affinité personnelle avec le vélo. Quelqu'un qui veille à ce que les athlètes et l'équipe en coulisse soient au top. J'ai dû réfléchir un moment avant d'accepter, mais depuis lors, je suis pleinement engagée dans ce défi. Heureusement, mon expérience professionnelle est utile. Il faut beaucoup de communication pour que nos 85 à 90 employés de neuf pays différents soient sur la même longueur d'onde. En pratique, cela implique d’écouter beaucoup, d’analyser et d’oser prendre des décisions.”

Les petites équipes consacrent énormément d'énergie et d'argent à l'encadrement des jeunes talents. Or, dès qu'ils sont performants, ils sont rachetés par de plus grandes équipes. C'est injuste.

Yana Seel
CEO d'Astana-Premier Tech

Des décisions parfois difficiles. Comme d’enlever 30% de leur salaire aux coureurs et au personnel quand le coronavirus a éclaté…

“Au début, ce choix n'a pas fait l'unanimité. J'ai reçu des appels de collègues d'autres équipes qui la remettaient en question. Mais grâce à ma formation en pharmacie et en technologie de laboratoire biomédical, je suis parvenue à la conclusion que la pandémie de coronavirus ne serait pas résolue en quelques semaines. Ce n'est que plusieurs mois plus tard, lorsque d’autres équipes ont adopté des mesures similaires, qu'il est devenu évident pour tout le monde qu'une décision aussi sévère était nécessaire pour garantir la survie de l'équipe.”

Vous dites que le sentiment d'appartenance à une famille, chez Astana-Premier Tech, est très important. Comment concilier cette dimension avec l’univers du sport professionnel de haut niveau?

“C'est un équilibre délicat. D'une part, les séances d'entraînement et les interactions avec les coéquipiers et le personnel ne peuvent devenir trop familières. Nous sommes une équipe professionnelle et nous voulons obtenir des résultats de haut niveau – ce n'est pas un jeu. D'un autre côté, j'ai pu constater à quel point les courses peuvent être épuisantes. Le Tour de France exige le maximum des coureurs! Tous ces voyages et les moments passés loin des amis et de la famille pèsent lourd. Si je peux faire en sorte que l'ambiance soit bonne et que les coureurs se sentent chez eux dans l'équipe, tout le monde y gagne. Par exemple, nous embauchons du personnel supplémentaire pour qu'après la course, les coureurs et le personnel puissent manger et se détendre une heure plus tôt.”

Il faut beaucoup de communication pour que nos 85 à 90 employés de neuf pays différents soient sur la même longueur d'onde.

Yana Seel
CEO d'Astana-Premier Tech

Vos idées sur le fonctionnement de l'équipe différaient-elles radicalement de celles auxquelles les gens étaient habitués?

“Je n'ai pas changé grand-chose à la politique sportive, car ce n'est pas mon domaine d'expertise. Les modifications que j'ai apportées concernent principalement le marketing et les finances. Astana a été fondée et était à l'origine entièrement financée par le gouvernement du Kazakhstan. Ce dernier voulait réduire ces investissements sans que cela ait d'impact sur les coureurs et les performances. Grâce à mon expérience du marketing et de la gestion dans le monde de l'entreprise, je savais que les accords de sponsoring pouvaient avoir un effet positif. Nous avons trouvé voici quelques années, dans le groupe canadien Premier Tech, un partenaire privé international solide. Aujourd'hui, cela se traduit par un business model complètement différent.”

Le cyclisme est en constante évolution. Qu'est-ce que vous aimeriez voir changer?

“J'aimerais que le système de transfert soit juste et équitable. Les petites équipes consacrent énormément d'énergie et d'argent à l'encadrement des jeunes talents. Or, dès qu'ils sont performants, ils sont rachetés par de plus grandes équipes… C'est injuste. Des règles plus claires de la part de l'Union cycliste internationale pourraient remédier à ce problème. En outre, pour ce qui concerne nos rentrées, nous dépendons à 80% des sponsors et des investisseurs. Contrairement aux équipes de football, les équipes cyclistes perçoivent beaucoup moins de droits de télévision et de diffusion. Cela aussi devrait évoluer.”

Pensez-vous que le sport cycliste a enfin accompli son “reboot” en matière de dopage?

“J'en suis convaincue. Les règles d'utilisation de certaines substances sont chaque année plus strictes. Le sport est désormais nettement plus axé sur les sportifs doués et les innovations dans le domaine des matériaux et des pièces de vélo. La science, également, est très présente. Par exemple en déterminant avec précision l'alimentation des coureurs, en l'ajustant au gramme près et en mesurant des éléments tels que l'apport et la consommation de calories. Le cyclisme s'est complètement réinventé dans ce domaine.”

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