L’expo que le Museum für Gestaltung de Zurich consacre actuellement au label de sacs Freitag s’appelle Out of the Bag. " Seul un modèle de sac est exposé ", explique Daniël Freitag. " Pour le reste, l’exposition relate l’histoire de Freitag : comment mon frère et moi avons fabriqué les premiers exemplaires nous-mêmes avec notre propre machine à coudre et des vielles bâches de camion et comment nous collectons, lavons, traitons, coupons et cousons ces bâches qui ont fait notre spécificité. Vous savez, même si nous nous trouvons encore un peu jeunes pour une rétrospective, nous éprouvons un petit sentiment de fierté ! " Des sacs en bâches de camion ? Il y a vingt ans, c’était avant-gardiste et les frères Freitag peuvent être qualifiés de pionniers du mouvement écologique qui s’est emparé de la mode et du design. La culture d’entreprise de Freitag est également un modèle du genre : les déchets sont limités et minutieusement triés, la consommation d’énergie est réduite au minimum et on n’utilise que des colles et des détergents écologiques. La conséquence, c’est qu’aujourd’hui, l’entreprise suisse n’a plus à se soucier de son image écologique et peut se consacrer à plein temps au look de ses produits.
Blanc, jaune, rouge
" Voilà plus de dix-neuf ans que nous nous consacrons à nos sacs en bandoulière ", explique Daniël Freitag. " Mon frère et moi avons vieilli avec nos sacs. " Lorsque nous leur demandons quel est précisément leur âge, il répond, sibyllin : " Disons, deux fois plus vieux que les sacs. " En tout cas, les Freitag ont atteint l’âge où leurs amis ne déambulent plus avec un sac Freitag, une icône du style street repérable à ses demi-lettres et imprimés graphiques. Par contre, on les imagine bien porter des accessoires plus élégants et plus sophistiqués. " Nous nous sommes fait la même réflexion, ce qui nous a amené à une version plus chic des sacs Freitag, la collection Reference. "
Pour créer le premier modèle de cette nouvelle collection, les frères ont travaillé avec Redaktionen Magazine, une revue spécialisée dans le journalisme d’investigation. " Le métier de journaliste me passionne ! " s’exclame Daniël Freitag. " Je n’ai jamais eu l’ambition d’écrire (les deux frères sont concepteurs graphiques, NDLR), mais j’admire les journalistes. Ce sont les messagers et les faiseurs d’opinion de notre temps, ils sont indépendants et osent prendre position. À cet égard, je trouve que cette profession colle parfaitement à la philosophie de Freitag. Nous aussi, nous avons toujours fait notre truc de notre côté. "
La principale différence, c’est que les pièces Reference sont monochromes. Pas d’imprimés graphiques, mais un sac entièrement blanc, jaune ou rouge, couleurs de la collection été 2012.
" La couleur unie est apaisée. Contrairement à Fundamentals, ces accessoires ne crient pas sur tous les toits " je suis un sac Freitag ! ". Ce n’est qu’en les regardant de près que l’on remarque que ce sont des bâches recyclées. " C’est plus difficile de trouver des bâches unies que des bâches imprimées, " parce que nous avons besoin d’une certaine qualité, ni trop usée, ni trop neuve. Parfois, pour la collection Reference, nous taillons des coupons dans des bâches imprimées. " Cette collection plus sobre a un prix plus élevé : le plus petit sac revient à 165 euros, alors que, pour ce prix, on a déjà un beau sac Fundamentals.
Limited edition
De temps en temps, les frères Freitag tombent sur une bâche d’une couleur particulière ou avec une patine spéciale. Ces lots sont utilisés pour les collections limited edition. " Il faut tenir compte du fait que la bâche ne se comporte pas du tout comme le cuir. Pour en faire des sacs et des accessoires, nous faisons appel à des ingénieurs qui étudient les possibilités de ce matériau. Par exemple, l’année passée, nous avons testé le fake snake, un motif python sur de la bâche épaisse. Il a fallu 648 pièces pour un shopping bag assemblé à la main. Pour la collection limitée de cet été, nous avons tissé des bandes de toile de bâche, ce qui donne un look particulier au sac de plage ! "
Les boucles et les éléments en métal des sacs Freitag sont également recyclés. On reconnaîtra un morceau de ceinture de sécurité ou un airbag. Et pratiquement toute la production se fait en Suisse. Tout, sauf la couture. " Pour cela, nous allons en France, au Portugal, en Tunisie et en Tchéquie ", explique Freitag.
" En Suisse, nous n’avons pas trouvé d’ateliers capables de traiter nos quantités. "
Les deux frères continuent à imaginer de nouvelles opportunités pour Freitag. " Le moment est venu. Écologie et recyclage sont hype. Je n’exclus pas qu’un jour Freitag fasse autre chose que des sacs. De l’architecture ? Oui, pourquoi pas des maisons ? "
La collection Reference est vendue en ligne sur www.freitag.ch
Expo Freitag, jusqu’au 29 juillet, Museum für Gestaltung, Zürich,
www. museum-gestaltung.ch