Les mini cabanes ont le vent en poupe. La chaîne japonaise Muji commercialise des maisonnettes préfabriquées. L'élégant Shelter signé par le label danois Vipp connaît un beau succès. C'est au tour d'un duo de designers belges d'ajouter sa pierre à l'édifice.
Michiel De Backer (24 ans) et Martin Mikovcak (23 ans) rêvaient d'une maison sur pilotis. "Pour l'installer dans un champ de maïs. Cool, non?" sourit De Backer, qui a rencontré Mikovcak pendant que ce dernier faisait un Erasmus à la Sint-Lucas Hogeschool de Gand. "Nous voulions qu'elle soit mobile, mais c'est difficilement compatible avec des pilotis. Nous avons donc abandonné cette idée et avons plutôt réfléchi à une petite maison. Et nous sommes arrivés à quelque chose de réalisable."
Baptisée Ark Shelter, cette maisonnette design de 3 mètres sur 9, en bois, peut être installée dans un jardin ou en pleine nature. Cette cabane 2.0 est mobile: elle peut passer du fond du jardin à une propriété dans le midi de la France ou en Espagne. Elle peut aussi accueillir ceux qui n'ont pas envie d'attendre qu'on leur délivre un permis de bâtir.
Très vite, les deux étudiants, pour qui ce projet est un deuxième job/hobby, ont cherché et trouvé un hangar et une équipe en Slovaquie. "C'était en décembre 2014. Nous avions concrétisé notre idée, mais il fallait trouver quelqu'un que cela intéresse. C'est alors que j'ai eu l'occasion de participer à l'organisation du 'Tour Global Champions Longines' à la Waagnatie, à Anvers. Au lieu d'un salaire, j'ai demandé un stand. Nous étions là, avec nos plans et nos maquettes, sans la moindre idée de la manière dont nous pourrions vendre ce truc! (Rires) Le dernier jour, un entrepreneur de Flandre occidentale est venu: il y croyait et a commandé une maisonnette. Notre premier Ark Shelter se trouve à Jabbeke où il sert de modèle d'exposition."
En janvier dernier, De Backer s'est lancé dans la vente et, depuis, le duo en a déjà vendu quatre: trois qui seront installées en Belgique et le quatrième en Toscane, en Italie, où l'Ark Shelter sera une chambre d'hôte dans le jardin.
Spacieux et lumineux
Ne dites pas de l'Ark Shelter que c'est une caravane, encore moins un bungalow! Les deux étudiants veulent justement en faire une alternative plus esthétique. Le modèle d'exposition que De Backer nous fait visiter à Jabbeke mesure 3 mètres sur 9 et pèse 9 tonnes. Le pin de couleur sombre à l'extérieur, spécialement planté et abattu en Slovaquie pour ce projet, le revêtement intérieur clair en panneaux de fibres ainsi que les grandes fenêtres en font un lieu spacieux et aéré malgré ses petites mensurations. "La grande baie vitrée est un atout", acquiesce De Backer. "Les planches en bois permettent de la fermer complètement Et ces mêmes planches peuvent également être rabattues et ainsi faire office de terrasse."
L'Ark Shelter est entièrement en bois. L'ossature, entièrement isolée et renforcée par des poutres, permet aux concepteurs de jouer avec le projet et de l'adapter aux désidératas du client. "Chaque exemplaire est différent", explique De Backer. "Aujourd'hui, nous sommes en pourparlers avec une créatrice de mode fraîchement diplômée qui travaille à sa première collection. Elle ne peut pas se payer un bâtiment, par contre, un Ark Shelter, c'est dans ses moyens. Une agence de publicité pense à en faire une unité de bureau. Et non, il ne faut toujours pas de permis de bâtir!"
Cette maisonnette préfabriquée de luxe revient entre 30.000 à 50.000 euros, mais elle ne demande pas de se retrousser les manches: elle est assemblée en Slovaquie, où vit Mikovcak et où la main d'oeuvre est moins chère qu'en Belgique. Elle y est complètement finalisée et équipée avec meubles, salle de bains, douche, lavabo, toilette, cuisine, poêle et éclairage LED.
Ensuite, elle est acheminée à destination par transport routier. Grâce à des barres d'acier prévues à cet effet sur son faîte, une grue la saisit et la dépose où le souhaite son propriétaire, dans un jardin ou en pleine nature. Il est conseillé de bien réfléchir à l'emplacement où l'on souhaite l'installer: si la première livraison est comprise dans le prix, la deuxième est à charge de son propriétaire et revient (sans doute) à un prix élevé.
Il n'est pas nécessaire de creuser de fondations. "Nous fixons des dalles d'un demi-mètre carré dans le sol sur lesquelles nous installons la maison. Nous n'utilisons ni vis ni béton, mais, en raison de sa forme et de son poids, ainsi que du fait qu'elle repose sur 8 points d'appui, l'Ark ne bougera pas", explique De Backer.
D'après les concepteurs, il faut tabler en tout et pour tout sur une demi-journée pour installer l'Ark Shelter. Ensuite, les conduites d'eau sont raccordées à une citerne (qui recueille l'eau de pluie et la purifie) ou au réseau de distribution. On le raccorde ensuite au réseau électrique. "Il faut deux câbles de 220 volts: dans un aussi petit espace, on ne consomme pratiquement rien. J'y ai vécu l'hiver dernier pour faire le test. Si le feu était alimenté une dernière fois vers 22h30, la température était encore agréable le lendemain matin."
Des panneaux solaires et une batterie pour stocker l'énergie sont également disponibles en option, mais coûtent assez cher. Plus l'Ark Shelter est éloigné de la civilisation, plus ce genre d'équipement peut s'avérer pratique, mais, pour l'instant, le duo n'a pas encore livré ce type de modèle.
Une brique dans le ventre
L'idée d'une petite maison facilement transportable est séduisante. "Cela peut faire office de maison d'hôtes, d'espace modulaire ou de bureau de jardin, mais l'Ark Shelter peut aussi servir de première maison pour ceux qui ne sont pas encore prêts à acheter une vraie maison", explique De Backer. "Vu son prix intéressant, ils sont nombreux à envisager un Ark Shelter. Comme les Belges ont une brique dans le ventre et que son prix n'est pas un frein, ce rêve de posséder sa maison est accessible au plus grand nombre. Avantage supplémentaire: cette variante de la maison dure des années et on peut l'emporter partout."
En février, l'Ark Shelter a été nommé dans la catégorie 'Projet immobilier de l'année' lors de la Nuit de la PME à Anvers. De Backer se consacre à plein temps à son entreprise. Il achèvera sa thèse l'année prochaine. En attendant, les deux étudiants en architecture continuent de rêver. "Nous avons aussi un projet avec une sorte de mezzanine. Je rêve de l'installer sur une plage en Belgique. Se réveiller et, directement, mettre les pieds dans le sable, c'est fantastique!"
www.ark-shelter.com