Aller chez le libraire comme on va à l'épicerie bio
Hier, j'attendais un colis dans un tabac près de chez moi. Il y avait la file et des paquets jusque sur le trottoir. Black Friday, Cyber Monday, Saint-Nicolas, Noël: pour suivre la cadence, bpost a engagé près de 2.000 personnes supplémentaires (sous forme de contrats intérim ou CDD) pour traiter 400 à 450.000 colis par jour! Il n'y a pas que chez bpost que les chiffres donnent le tournis. Citons-en un dernier découvert il y a peu et qui a de quoi choquer: au moins 30% des marchandises retournées chez Amazon sont détruites. Pas le temps de déballer, reconditionner, renvoyer, alors on détruit non seulement des livres, mais aussi du matériel informatique, des jouets, des articles de bricolage. Moi-même j'achète pas mal de livres en ligne (des secondes mains, via une plateforme allemande "moins pire" qu'Amazon). Par contre, ceux que l'on offre (en général neufs), il importe de se demander comment et où on les achète. Yves Limauge, coprésident du syndicat des libraires francophones de Belgique et lui-même libraire à Woluwe-Saint-Lambert, explique à ses clients: "Amazon ne paie pas d'impôts (2% versus 25% pour les autres sociétés) et n'emploie personne en Belgique alors que nous sommes 10 Belges à travailler dans la librairie et vivre grâce à elle. En deux ans, les gens sont devenus de plus en plus réceptifs au discours de l'achat local." Face au mastodonte (80 à 90% des ventes de livres sur Internet), il importe de se réinventer. Un processus qui passe par la réaffirmation de son identité: "Les librairies sont des lieux de rencontres. On renforce cette dynamique en organisant des ateliers pour petits ou grands, des groupes de lecture, de méditation, des démonstrations gustatives, etc. En fait, on devient de petits centres culturels, ça fait partie des demandes des clients". Tel est le manifeste de la campagne inédite que les libraires indépendants ont lancée en cette fin d'année avec le concours de Benoit Poelvoorde et sa phrase choc qui tourne en boucle sur les réseaux sociaux: "Une librairie indépendante, c'est comme une boite de nuit. On ne sait jamais qui on va rencontrer... et avec qui on va rentrer." Objectifs: déclencher le réflexe "librairie indépendante" comme on va de plus en plus naturellement au magasin bio, poser un acte militant en faveur de l'achat local et citoyen, et remettre le conseil original, pertinent et passionné au coeur de l'acte d'achat. Une démarche qui prévaut dans les pages qui suivent. Bonne(s) lecture(s)!