Un an après son lancement, Threads peine à convaincre
Il y a un an, Meta lançait officiellement Threads, son nouveau réseau social censé venir concurrencer X. Après un début record, largement porté par la curiosité, la plateforme ne convainc qu'à moitié.
Jour de fête chez Meta. Ce vendredi, Threads, le petit frère de Facebook, Instagram et WhatsApp, célèbre son premier anniversaire. Lancé d'abord aux États-Unis, la plateforme est accessible en Europe depuis la fin de l'année dernière. Threads permet de poster des photos, des vidéos et des textes de maximum 500 caractères. La description pourrait convenir parfaitement à X (ex-Twitter). Ce n'est certainement pas un hasard. Threads a clairement été créé pour s'attaquer au célèbre réseau social repris par Elon Musk fin 2022.
À l'époque, la transition de Twitter vers X se fait péniblement et les utilisateurs fuient en masse le réseau social et sa nouvelle ligne "éditoriale" se voulant beaucoup plus libre avec une modération minimale. A priori, le timing de lancement est donc idéal pour Threads qui compte bien récupérer un maximum de nostalgiques du petit oiseau bleu, imaginé par Jack Dorsey.
Mark Zuckerberg trouve le concept d'un réseau social centré sur les messages courts très porteurs. "Le fait qu'il n'y ait pas eu d'application de conversations textuelles qui ait atteint un milliard de personnes constitue une étrange anomalie dans l'industrie technologique", expliquait-il l'année dernière dans un podcast de l'informaticien Lex Fridman.
Un an après, le milliard est encore loin. Mais sans surprise, chez Meta, on parle évidemment d'un bon démarrage. Ce mercredi, Mark Zuckerberg a d'ailleurs fièrement annoncé que sa plateforme avait atteint les 175 millions d'utilisateurs mensuels. Si le patron semble satisfait de ses débuts, ils sont toutefois à mettre en perspective.
"Une semaine après, on voyait déjà que la tendance était déjà en train de redescendre."
Effet de curiosité
Au moment d'attirer des utilisateurs, Threads a largement bénéficié d'un effet de curiosité. Sur ses 175 millions de comptes créés, 100 millions l'ont été dans les cinq jours qui ont suivi le lancement de la plateforme, en faisant l'un des meilleurs débuts de l'histoire des réseaux sociaux. Pour atteindre un tel pic, Threads a très largement pu compter sur les autres plateformes de Meta pour attirer les nouveaux utilisateurs. L'inscription se fait nécessairement via Instagram, et des posts Threads apparaissent dans les fils d'actualité d’Instagram et Facebook pour tenter de ramener des utilisateurs vers sa nouvelle plateforme.
Le départ canon n'aura donc duré qu'une poignée de jours. "Une semaine après, on voyait déjà que la tendance était déjà en train de redescendre", confirme Valentin Pliester, le fondateur de Socialsky, une agence spécialisée dans les campagnes marketing sur les différents réseaux sociaux. "Aucun de nos clients ne nous a d'ailleurs jamais demandé des informations pour savoir comment se positionner sur le réseau", explique le patron qui travaille pourtant avec une quarantaine de marques.
Le succès d'une plateforme ne se mesure d'ailleurs pas qu'à son nombre d'utilisateurs mensuels. Le groupe préfère rester discret sur l'utilisation quotidienne de sa plateforme, le chiffre n'ayant jamais été officiellement donné. L'indicateur est pourtant essentiel pour évaluer la réelle popularité d'un réseau social. "L'utilisateur mensuel n'est pas représentatif, car si vous cliquez une fois sur l'app et que vous restez une seconde dessus, vous êtes déjà comptabilisé comme utilisateur. L'information la plus importante est le temps moyen passé dans l'app, mais Threads ne donne pas cette métrique", glisse Valentin Pliester.
D'autres statistiques ont tendance à relativiser le début en fanfare de la plateforme. Dans le duel face à X, c'est bien l'entreprise d'Elon Musk qui reste, de loin, le réseau le plus populaire. Auprès des utilisateurs qui sont désormais 600 millions (sur base mensuelle), mais aussi des personnalités. Aujourd'hui, le compte du footballeur brésilien Neymar est le plus populaire sur Threads. Il ne compte pourtant "que" 16 millions d'abonnés, contre plus de 60 millions sur son compte X.
"La plupart des tendances qu'on voit sur Threads viennent d'autres plateformes et beaucoup de posts sont des copier-coller de X."
Stars discrètes
Si les stars sont relativement peu suivies, elles sont aussi bien moins actives que sur les autres grandes plateformes. Neymar, Selena Gomez, Kylie Jenner et Kim Kardashian, soit quatre des cinq personnalités les plus populaires sur Threads, n'ont plus publié de contenus depuis plusieurs mois.
Le dernier message de Neymar remonte même à un an. Il a, en revanche, encore tweeté la semaine dernière. " On voit que des noms assez nouveaux dans la politique comme Gabriel Attal préfère encore largement miser sur X plutôt que sur Threads", illustre encore le spécialiste.
"L'un des gros problèmes de la plateforme est qu'elle n'a pas essayé d'attirer de grands noms et des influenceurs à succès. La plupart des tendances qu'on voit sur Threads viennent d'ailleurs d'autres plateformes et beaucoup de posts sont des copier-coller de X. Il y a un positionnement presque naïf des responsables de la plateforme qui pensaient pouvoir y arriver naturellement. Quand TikTok s'est lancé aux États-Unis, ils ont payé un tas d'influenceurs actifs sur d'autres réseaux sociaux pour réaliser un maximum de contenus", explique Valentin Pliester.
En cherchant avant tout à rivaliser avec X, Threads en a d'ailleurs oublié d'y mettre sa touche personnelle. Threads espérait pourtant jouer la carte d'une plateforme plus apaisée avec des contenus et débats moins virulents. " Stratégiquement, c'est un positionnement qui a du sens. Aujourd'hui, X a du mal à trouver des annonceurs. Cela peut refroidir plus d'une marque de voir son nom affiché sur un réseau où l'on voit de tout, du contenu humoristique, des débats d'idées, mais aussi des vidéos violentes. L'effet "safeplace" est donc forcément plus intéressant, mais il faut voir de l'autre côté si les utilisateurs sont là aussi".
Pas de publicité à court terme
Threads est toutefois encore en pleine construction. Une bonne partie des posts de Zuckerberg sur la plateforme se penchent d'ailleurs sur les nouveautés et services amenés régulièrement sur la plateforme. Threads étant encore très loin d'être mature, Meta n'a pas encore prévu d'en faire une source de revenus.
Lors d'un call avec les investisseurs l'année dernière, Zuckerberg a confirmé ne pas prévoir d'introduire la publicité dans la plateforme avant d'avoir atteint "des centaines de millions d'utilisateurs". Le patron se donne du temps. Reste à savoir s'il parviendra un jour à suffisamment attirer d'utilisateurs.
"Il n'est pas impossible que la stratégie évolue et que le projet soit freiné, comme ce fut le cas pour le Metavers, voire même qu'on n’entende plus du tout parler de Threads dans les mois à venir", avance Valentin Pliester. Le groupe pourrait aussi potentiellement viser en priorité les marchés émergents et ceux où Twitter est moins dominant. "C'est aussi une possibilité, mais jusqu'ici, Mark Zuckerberg n'a pas du tout vendu sa stratégie de cette façon".
- Un an après son lancement, Threads peine à rivaliser avec X (ex-Twitter) malgré un départ fulgurant.
- Avec 175 millions d'utilisateurs mensuels, la plateforme souffre d'un manque d'engagement quotidien et de personnalités influentes.
- Meta n'a pas encore monétisé Threads et pourrait ajuster sa stratégie face à des résultats mitigés.
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