Qui n’a pas une connaissance qui doit se battre pour tenter d’obtenir le paiement d’une pension alimentaire? "Aujourd’hui 40% des pensions alimentaires sont pas ou mal payées (retards, paiements partiels ou erratiques, etc.). Sans compter que pour avoir droit à une pension alimentaire, encore faut-il qu’il existe une décision de justice. Or, en amont, beaucoup renoncent à faire valoir leur droit ou finissent par abandonner. C’est dire l’ampleur réelle du problème", met en perspective Quentin Fischer, avocat et spécialiste des affaires familiales.
3 façons de faire valoir ses droits
1. S’adresser au Secal
La création il y a dix ans du Secal (Service de créances alimentaires) a donc été accueillie très positivement. Cette instance neutre, disposant de moyens efficaces, devait permettre d’apaiser quelque peu les tensions et soulager les situations les plus critiques. "C’était une excellente idée, reconnaît l’avocat, mais en pratique, on se heurte vite au caractère restrictif des conditions d’intervention". Le dispositif sera d’ailleurs quelque peu modifié à partir du 1er janvier 2015, ce qui devrait accroître son attrait. L’occasion d’évaluer l’efficacité des solutions qu’il propose à ce jour et des améliorations qui se profilent. Disons-le d’emblée, faute d’être la panacée, c’est certainement un ballon d’oxygène et un soutien précieux pour ceux qui tirent le diable par la queue.
Le Secal qui a accès aux informations clés relatives au patrimoine et aux revenus des débiteurs d’aliments, aide les créanciers qui disposent d’un acte notarié ou d’une décision judiciaire, à recouvrir des pensions alimentaires et leurs éventuels arriérés. L’organisme peut également accorder des avances sur pension. Mais les conditions pour en bénéficier sont très restrictives: 1.386 euros maximum + 66 euros par enfant à charge (ressources propres du demandeur). "L’avance est en outre limitée à 175 euros/enfant/mois, ce qui est peu et n’intègre évidemment pas les frais’extraordinaires’(frais médicaux, scolaires, de loisirs,…) qui représentent pourtant souvent la charge la plus lourde", déplore Quentin Fischer. Cette facilité n’est en outre accordée que pour 6 mois renouvelables (si les conditions sont toujours remplies), ce qui nécessite des démarches administratives. "Enfin, et c’est sans doute ce qui handicape le plus son action: alors que, s’agissant d’une dette de nature alimentaire, il est toujours possible de saisir l’intégralité des revenus d’un débiteur, le Secal ne peut opérer de saisie à partir du revenu d’intégration! (NDLR: 711 euros pour un isolé)."
Grâce aux nouvelles règles qui s’appliqueront aux dossiers introduits à partir du 1er janvier 2015, le Secal pourrait connaître un regain d’intérêt. (lire encadré).
En attendant lorsqu’un dossier est accepté par cet organisme, le créancier devra lui céder 5% des sommes recouvrées. Un débiteur est considéré comme dans son tort, dès le moment où deux mensualités n’ont pas été versées (intégralement) sur les 12 mois précédant la demande d’intervention du Secal. Il pourra éventuellement bénéficier de facilités de paiement (s’il apporte la preuve de réelles difficultés) et le cas échéant, demander au juge de diminuer ou supprimer la pension si sa situation ou celle du créancier a changé de façon telle que la pension n’est plus justifiée. Lorsqu’un dossier est géré par le Secal, le débiteur doit payer sa pension et les éventuels arriérés, directement à cet organisme et s’acquitter en plus d’une contribution équivalente à 10% du montant récupéré.
2. Via un huissier
Il y a évidemment d’autres moyens de faire valoir ses droits. Certains pourraient ainsi être tentés de s’en remettre plutôt à un huissier de justice pour récupérer leur dû. Ils risquent pourtant de déchanter assez rapidement, pour une question de coût cette fois. "Les frais sont évidemment fonction du type de saisie, mais dans le cas qui nous occupe, on atteint vite 1.000 euros TVAC. Les procédures de saisie sur salaire par exemple nécessitent en effet 3 exploits d’huissier (entre 300 et 350 euros l’acte). Et s’agissant d’une saisie mobilière qui implique d’avantage d’interventions concrètes et de manipulations (déménagement, vente publique, placards, etc.). Tous ces frais étant bien sûr à charge du débiteur d’aliments… Et encore faut-il que la saisie aboutisse. Les moyens à engager sont donc souvent sans commune mesure avec les montants susceptibles d’être récupérés", met en garde l’avocat du cabinet Blitz-de Callataÿ-Goldschmidt & Associés.
3. Obtenir une délégation des sommes
Le scénario est par contre plus confortable pour les (rares) créanciers qui obtiennent du juge une "délégation des sommes". Cette procédure, inscrite à l’origine dans le jugement, leur permet de percevoir directement les montant fixés par le juge auprès de tiers qui sont redevables de sommes d’argent au débiteur (ex: son employeur). "Mais en pratique, constate Quentin Fischer, le juge n’octroie cette procédure que s’il existe un risque sérieux que le débiteur, (compte tenu de son attitude, de son passé, etc.) n’exécute pas spontanément et régulièrement ses obligations alimentaires".