Gérez-vous activement vos finances?
Sans doute pas assez. Ces choses ne m’ont jamais fort passionné et l’argent n’est pas mon moteur. J’égare toutes les cartes de fidélité que l’on essaye de me donner. Je trouve que les fournisseurs et les opérateurs ont une imagination sans limites pour rendre les comparaisons de tarifs les moins aisées possible. Je suis plus exigeant quand il s’agit de la gestion des fonds d’autrui. Au cabinet — nous sommes une cinquantaine -, j’ai toujours veillé à revoir les charges en faisant jouer la concurrence (énergie, téléphonie, informatique…).
Quelle leçon avez-vous tirée de la crise financière, à titre personnel?
La faillite de Lehman Brothers m’a fort impressionné. Je n’avais jamais pensé que cela puisse arriver aussi sournoisement: crise immobilière des subprimes et faillite d’une banque américaine de premier rang. J’étais fort exposé en actions. Heureu-sement pas dans le secteur bancaire et pas en dollars, mais la baisse fut néanmoins sévère. Bien que cela soit inhérent à ce type d’investissement, il est impressionnant de voir une partie de ses économies s’évaporer aussi vite. Depuis, j’ai mieux diversifié, mais j’ai surtout beaucoup relativisé.
Votre métier a-t-il modifié votre perception des questions d’argent?
"Le pire risque, c’est une vie sans risque!"
Tout se complexifie davantage. Travailler en droit financier m’a appris que si les banques font de gros efforts pour mieux informer et conseiller leurs clients, beaucoup de consommateurs ou d’entreprises restent analphabètes en la matière. Demandera-t-on demain aux banques de se charger de l’éducation financière de leurs clients?
Avez-vous préparé votre retraite? Comment l’envisagez-vous?
Un ancien bâtonnier ne quitte jamais le navire. J’irai sans doute au-delà de 67 ans si la santé me le permet. J’ai la passion de mon métier et la défense d’autrui dans mon ADN. Après, je continuerai à fuir les temps morts et l’ennui. Je pourrais m’investir dans le monde associatif et culturel, apprendre le solfège et le piano (je rêve de m’endormir en lisant une partition de Bach), suivre une formation en philosophie et lettres pour apprendre à (enfin) devenir sage. La pension légale d’un indépendant est très light. Je veille donc, avec l’aide de professionnels, à me constituer une pension complémentaire ad hoc.
Avez-vous modifié récemment vos habitudes en matière de mobilité?
J’ai modifié mes horaires. J’adore arriver au cabinet dès l’aube. Il n’y a pas d’embouteillages et je trouve une belle sérénité de travail lorsque la ville s’éveille. J’emprunte très peu les transports en commun et les taxis. Je reste adepte de la voiture. Nous avons fait l’expérience de mettre à disposition une voiture électrique pour les déplacements des membres du cabinet. Mais elle a fini sa vie dans un crash au fond d’un tunnel, heureusement sans faire de victime.
Avez-vous des loisirs coûteux?
Je pratique des sports peu onéreux: jogging, fitness, badminton, varappe. Ma passion pour la création l’est en revanche un peu plus: je peux m’emporter pour une œuvre d’art contemporain ou pour l’opéra: je suis un familier de la Monnaie, mais aussi de Salzbourg, Bayreuth, Glyndebourne. Cela permet de toucher un peu le cuir des anges….
Avez-vous déjà connu une grosse déconvenue financière?
J’ai été relativement préservé jusqu’ici, à part quelques cambriolages à la maison. Si les objets disparus se remplacent, les souvenirs personnels ou de famille disparaissent à jamais. Ce sont des coups de canif irrémédiables dans votre histoire.
Parlez-vous d’argent en famille ou entre amis?
L’argent ne figure pas parmi les sujets privilégiés des conversations en famille ou entre amis. Je ne sais pas m’émouvoir avec des euros, des soldes ou des prix cassés. Par contre, on me demande régulièrement un avis ou des conseils. Cela fait un peu partie des ombres de mon métier, à l’intersection de nombreuses failles. Lorsque je suis sollicité à titre personnel, j’accepte les demandes qui permettent à mes proches de s’émanciper. Mais je suis un mauvais créancier, je n’exige rien en retour.
Y a-t-il des biens et services que nous payons encore trop cher?
Nous vivons des mutations extraordinaires. Les nouvelles technologies montrent qu’il y a moyen d’obtenir des biens et des services à de bien meilleures conditions qu’avant. Uber (transport), AirBNB (logement), Testamento (notaire), révolutionnent le marché. Le monde des avocats n’est pas à l’abri. En France, WeClaim vient de voir le jour (No win no fee). Ces initiatives doivent nous faire réfléchir à l’organisation de nos métiers et à la manière dont nous facturons nos prestations.
"Les nouvelles technologies montrent qu’il y a moyen d’obtenir des biens et services à de bien meilleures conditions."
Avez-vous préparé votre succession?
J’y réfléchis dans la mesure où je ne veux pas qu’il y ait de faux débat ou de règlements de compte post mortem. On ne choisit pas son héritage. C’est lui qui nous oblige. C’est le privilège et le devoir de celui qui s’en va d’organiser sa succession et d’anticiper les soucis.
-0,20%: "Le taux de la facilité de dépôt octroyée par la BCE. Qui aurait imaginé un jour que les intérêts créditeurs seraient négatifs?"
1,6180339: "C’est le nombre d’or de diverses proportions. Il faut réapprendre à mettre de l’esthétique et du sublime dans notre quotidien."
4,30 €: "La somme que je dépense quotidiennement pour l’achat de journaux. L’Echo, je le lis sur mon smartphone quand je me lève."
429: "L’article du code judiciaire qui dispose que l’avocat n’accepte de conseiller ou de défendre aucune cause qu’il ne croît pas juste en son âme et conscience."
523: "Notre cabinet bruxellois est situé au 523 avenue Louise, aux portes du bois de la Cambre."