Face aux contraintes financières et à un cadre fiscal et juridique toujours plus exigeant, les entrepreneurs peuvent se sentir perdus. Juriste et expert-comptable à la fois, Guillaume Schmitz est Partner et directeur du bureau de Waterloo au sein du réseau Moore. Il explique comment une approche multidisciplinaire fait évoluer les métiers de la finance, tant au bénéfice des start-up que des entreprises familiales.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du cadre légal qui entoure la profession?
“Celui-ci oblige de plus en plus le dirigeant d’entreprise à faire preuve de responsabilité financière. Par exemple, le Code des sociétés, entre autres mesures, impose à l’administrateur de procéder à un test de solvabilité et à un test de liquidité avant le versement de dividendes, afin de veiller à ne pas mettre à mal la capacité de la société à s’acquitter de ses dettes. Par ailleurs, les normes comptables sont de plus en plus strictes.”
Les obligations comptables sont donc vécues de plus en plus comme une contrainte?
“Pour ceux qui considèrent uniquement la comptabilité comme un outil d’information à des tiers, oui. Nous préférons voir en elle la chance d’avoir une bonne connaissance de la situation de son entreprise, de mieux évaluer sa propre capacité de développement et de réfléchir à son avenir financier en toute connaissance de cause.”
“Nous ne sommes pas les seuls. De plus en plus de dirigeants veulent avoir une vision plus claire et travailler sur des budgets. Nous mettons en place avec eux des outils plus approfondis de gestion de trésorerie. Il ne s’agit plus de fournir des chiffres et des tableaux, mais d’apporter la clarté qui permet à l’entrepreneur d’avancer de manière informée et lucide.”
Nous ne nous contentons plus de fournir des chiffres et des tableaux: nous apportons la clarté qui permet à l’entrepreneur d’avancer dans la bonne direction.
Comment expliquer cette évolution?
“Au-delà de la loi, beaucoup ont été conscientisés par l’augmentation importante du nombre de faillites de ces dernières années. En matière financière, j’ai le sentiment que nombre d’entrepreneurs avancent moins ‘au feeling’ qu’il y a quelques années. La hausse des taux d’intérêt, la fin des dispositifs d’aides publiques post-Covid et des investisseurs plus prudents… tout cela a probablement joué. Nos comptables sont souvent leurs premiers interlocuteurs et personnes de confiance. Les entrepreneurs se tournent vers nous pour échanger sur les risques et opportunités de leur business, obtenir des conseils ou partager des idées.”
Est-ce aussi le cas pour les start-up?
“Peut-être encore plus. Les dirigeants savent que les premiers mois d’une entreprise sont risqués et qu’ils n’auront pas toujours, par les temps qui courent, de deuxième chance. Notre rôle ici est de mettre en place un cadre qui concrétise par des chiffres la vision des entrepreneurs, qui identifie et maîtrise leurs risques financiers et qui permette de prévenir au maximum un échec, bien qu’il survienne malheureusement dans certains cas. Nous agissons là comme une véritable boussole financière.”
Pour les grands projets comme pour les petits détails qui pour vous font toute la différence.
Comment les aidez-vous concrètement à professionnaliser leur approche?
“Pour commencer, nous nous nous imprégnons du métier de chaque client et veillons à comprendre parfaitement son modèle économique. L’époque où cette relation se limitait à un comptable qui préparait des comptes et un dirigeant qui approuvait sans trop se pencher dessus est révolue.”
“Les outils digitaux – prédictifs, dashboards, simulateurs, etc. - ont largement évolué. Ils permettent de se focaliser sur le volet financier plutôt que comptable, d’élaborer des plans et d’anticiper les flux de trésorerie. Ou encore de comparer les performances par rapport à un historique ou un objectif. De tels outils sont essentiels afin de s’assurer que le cap de l’entreprise est le bon, ou qu’une nouvelle direction est à considérer.”
“Bien entendu, le client reste maître de son choix, tant en termes d’information dont il veut disposer que de décision financière. Mais nous voulons être en capacité, quand celles-ci existent, de lui exposer les alternatives qui s’offrent à lui et auxquelles il peut ne pas avoir pensé. Ainsi, parce qu’il comprend en profondeur tous les aspects d'une entreprise, le comptable offre aujourd’hui une valeur ajoutée qui va bien au-delà de l’expertise financière. En agissant comme un partenaire stratégique, il devient essentiel à la réussite d'une entreprise.”
On trouve beaucoup d’entreprises familiales en Wallonie et à Bruxelles. Nécessitent-elles une approche particulière?
“Derrière chaque entreprise familiale, il y a une histoire, toujours différente. Lors de la première rencontre, pour peu que le client y soit ouvert et sans même savoir si l’on va travailler ensemble, nous prenons réellement le temps d’écouter ce contexte et de comprendre cet historique familial et entrepreneurial.”
“Souvent, le rêve d’un fondateur est de transmettre à la génération suivante tout en assurant son propre avenir financier. Or, son entreprise est son capital le plus important. Se posent alors tôt ou tard les questions de valorisation et des moyens de transmission en fonction des attentes de chacun.”
“Tout cela fait appel à des techniques et des dispositions juridiques de plus en plus complexes, qui exigent une approche multidisciplinaire. C’est pour offrir ces réponses intégrées et sur mesure que Moore a choisi de disposer, en interne, d’experts comptables mais aussi juridiques, fiscaux ou en corporate finance et planification patrimoniale, notamment.”