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Le détachement, une pratique à mieux réguler

L'affaire bpost/De Sutter démontre qu'il est nécessaire d'introduire davantage de transparence dans le fonctionnement des cabinets ministériels.

Une faute grave. Voilà comment on peut qualifier l'affaire qui éclabousse la ministre des Entreprises publiques, Petra De Sutter (Groen). Comme L'Echo vous le révélait, deux experts du cabinet ministériel, qui ont négocié le contrat de gestion avec bpost, ont été rémunérés pendant plus de deux ans par cette même entreprise postale. Bien que la ministre jure le contraire, le conflit d'intérêts potentiel est patent.

La pratique du détachement crée un mélange des genres malsain, des zones grises où la frontière entre la défense de l'intérêt général et de l'intérêt partisan est parfois floue.

Petra De Sutter a certes quelques circonstances atténuantes. Cette situation ne revêt aucun caractère illégal. La ministre y a mis fin proactivement il y a plusieurs semaines. Le détachement est un usage largement répandu. Et un responsable politique peut avoir légitimement besoin d'experts pour l'entourer. En l'occurrence, Petra De Sutter, qui n'a pas d'administration postale propre, peut avoir eu de bonne foi recours aux services de deux collaborateurs expérimentés difficilement trouvables ailleurs que chez bpost.

Mais sur le principe, cette affaire n'en demeure pas moins inacceptable. Elle comporte aussi deux circonstances aggravantes. D'abord, bpost a continué à rémunérer les deux personnes concernées, rendant le conflit d'intérêts potentiel encore plus flagrant. Ensuite, bpost est une entreprise publique cotée, donc avec des intérêts partiellement privés et l'objectif de maximiser ses profits dans un marché très concurrentiel.

Au-delà de ce cas précis, cette affaire démontre qu'il est nécessaire d'introduire davantage de transparence dans le fonctionnement des cabinets ministériels. La pratique du détachement pose question. Pour rappel, elle permet à un ministre de recruter temporairement un membre du personnel d'une administration ou d'un organisme public. Ce faisant, elle gonfle les effectifs, déjà très fournis et coûteux, des cabinets. Elle crée un mélange des genres malsain, des zones grises où la frontière entre la défense de l'intérêt général et de l'intérêt partisan est parfois floue. Un exemple: une personne détachée de l'administration peut être amenée à conseiller un ministre sur le contrat d'administration du service public qu'elle réintégrera ultérieurement. Schizophrénique.

Par corollaire, le détachement appauvrit la fonction publique en la privant de ses meilleurs cadres, en la désorganisant et en la colorant politiquement. Cela crée un cercle vicieux, puisque le ministre suivant va vouloir renforcer son cabinet face à une administration peut-être moins efficace et/ou moins compatible politiquement. Cette pratique du détachement mériterait d'être mieux régulée et limitée. La Belgique doit tendre vers des cabinets plus restreints, travaillant en bonne intelligence avec des administrations dépolitisées et flexibles.  

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