PME et indépendants, préparez-vous au passage à la facturation électronique

À compter du 1ᵉʳ janvier 2026, la facture électronique structurée sera obligatoire pour presque toutes les opérations entre les entreprises belges assujetties à la TVA (B2B), signale le SPF Finances. "Cette obligation touche près de 1,2 million d’entreprises soumises à la TVA", selon le fisc.

Une telle facturation est déjà obligatoire, depuis le 1ᵉʳ mars 2024, dans le cadre de la facturation aux pouvoirs publics (B2G).

"Le but de cette facturation est de diminuer l’écart de TVA et de digitaliser l’économie belge", ajoute le SPF Finances. "La Belgique a un train d’avance sur le règlement européen qui devient obligatoire pour les transactions intracommunautaires à partir du 1er juillet 2030."

1/ Une facture électronique, c'est quoi?

Dans la législation TVA, il existe deux types de factures électroniques reconnues qui ont la même valeur qu'une facture papier.

D'une part, il y a la facture électronique "ordinaire". "Il s’agit par exemple d’une facture au format PDF dont la structure et la mise en page sont libres, tant que les données obligatoires y sont indiquées", explique le fisc.

D'autre part, il y a la facture électronique "structurée". Il s’agit d’une facture électronique qui est établie, envoyée et reçue dans une forme électronique structurée, "ce qui permet son traitement automatique et électronique".

2/ En quoi est-elle structurée?

Pour bien comprendre la différence, il y a lieu de définir trois types de factures "numériques".

Il y a tout d'abord la facture "PDF Image". "C'est une facture papier qui a été scannée", explique Jérôme Tailleur, cofondateur d'Horus, un logiciel de comptabilité basé sur les nouvelles technologies. "Autrement dit, pour exploiter ce document, via un logiciel comptable par exemple, il va falloir recourir à un outil de reconnaissance de caractères (OCR)."

Ensuite, il y a la facture "PDF Texte", soit un document qui a été généré via un logiciel. "Dans ce cas-ci, un logiciel comptable peut exploiter les informations du document sans l'aide d'un OCR."

Enfin, depuis 2008, il y a la facture électronique UBL (Universal Business Language). "C'est une facture PDF Texte combinée à un fichier .XML qui est lui-même structuré au format UBL."

Un fichier XML (eXtensible Markup Language) est un fichier structuré qui organise des données sous forme de balises hiérarchisées, un peu comme un document Word avec des titres et des sous-titres. Il permet d’échanger des informations de manière standardisée entre différents logiciels, facilitant ainsi l’automatisation et le traitement des données.

Bref, c'est bien ce dernier type de facture qu'il faudra obligatoirement envoyer et recevoir à compter du 1ᵉʳ janvier 2026.

3/ Si la facture électronique structurée existe déjà, quel est le changement pour 2026?

"Techniquement parlant, il n'y a quasi aucune différence entre les factures électroniques UBL émises depuis 2008 et celles qui seront émises à compter du 1ᵉʳ janvier 2026", répond Jérôme Tailleur. "Le fichier est le même, il est structuré."

"Mais il y aura pourtant une différence majeure à partir de l'année prochaine: la méthode d'envoi. La facture structurée de 2008 était envoyée par e-mail, alors que celle de 2026 devra obligatoirement être envoyée via le réseau Peppol (Pan-European Public Procurement Online)."

4/ C'est quoi le réseau Peppol?

C'est un réseau fermé – financé conjointement par la Commission européenne et 18 instances publiques – qui permet d'envoyer en toute sécurité des documents commerciaux numériques tels que des factures, mais aussi des devis, des bons de commande, etc. Près de 250.000 entreprises sont déjà inscrites sur Peppol, selon le SPF Finances.

5/ Comment fonctionne Peppol?

"Pour bien comprendre, il y a moyen de faire une analogie entre Peppol et bpost", selon Jérôme Tailleur. "Si je veux envoyer un colis, je vais dans un point relais, ma librairie par exemple. Ce colis va alors être envoyé dans un centre de tri bpost où il sera redirigé vers le point relais de mon destinataire."

"Peppol, c'est un peu la même chose: votre facture va partir de votre point d'accès (voir question 6) vers le réseau Peppol qui la redistribuera vers le point d'accès de votre client.

6/ Comment établir des factures électroniques et les envoyer?

Si, jusqu'ici, vous avez toujours fait vos factures à l'aide de logiciels comme Word ou Excel, il va falloir changer. Une liste des applications logicielles conformes est disponible via la plateforme fédérale efacture.belgium.be.

Selon les cas, une telle application peut également offrir un service de point d'accès au réseau Peppol, soit parce que son éditeur est un fournisseur de services certifiés, ou bien parce qu'il a conclu un accès à Peppol avec un tel fournisseur.

Les fournisseurs de services certifiés sont repris sur Peppol.org. Il y a notamment Billit, Codabox, Digiteal, Horus, Octopus, Odoo, UnifiedPost, Teamleader, etc.

"Sans ce point d'accès, vous ne pourrez ni envoyer, ni recevoir de facture", insiste Jérôme Tailleur.

Mais avant d'opter pour un logiciel de facturation et/ou un point d'accès Peppol, prenez contact avec votre expert-comptable pour choisir avec lui la ou les solutions qui vous conviendront le mieux, tant de point de vue de l'efficacité que des coûts à engager.

7/ Combien ça coûte?

Les tarifs peuvent fortement varier d'un logiciel à l'autre et d'un fournisseur de point d'accès à un autre. Via Horus, par exemple, le service de réception de factures via Peppol revient à 3,50 euros/mois. "Par contre, si un indépendant doit émettre des factures B2B, le coût sera de 14 euros/mois", précise Jérôme Tailleur.

Autre exemple: via la plateforme Doccle, il est possible en tant qu'indépendant de s'enregistrer gratuitement sur Peppol et d'y recevoir gratuitement tous ses documents. "Si l'utilisateur veut également convertir ses factures au format UBL et les envoyer, il peut activer la fonctionnalité 'Doccle Pro' pour un prix fixe (qui n'est pas encore connu, NDLR)", selon Jonathan Haasl, responsable du marketing auprès de Doccle. 

"L’utilisateur pourra téléverser sa facture (Word, Excel, PDF) dans Doccle, notre modèle d’IA la convertira automatiquement au format UBL réglementé et l’enverra ensuite au destinataire via Peppol. Cette fonctionnalité d'envoi et de conversion via Peppol devrait être lancée d'ici mai."

8/ Y aura-t-il des exceptions?

"En vertu de l'article 44 du Code de la TVA, les indépendants non soumis à la TVA n'ont aucune obligation à passer à la facturation électronique, tant pour la réception que l'envoi de factures", répond le cofondateur d'Horus. "C'est, par exemple, le cas pour les professionnels de la médecine qui ne sont pas en société".

En outre, la facturation électronique structurée n'est pas obligatoire en cas de facturation internationale ou lorsqu'une facture est adressée à un consommateur (B2C).

Mais attention: même si vous n'avez que des clients "personne physique" (B2C), vous devez aussi pouvoir recevoir des factures électroniques structurées de vos fournisseurs (B2B). Vous devez donc adapter vos systèmes à cet effet d'ici janvier 2026.

9/ Les factures électroniques et papier peuvent-elles coexister?

"Jusqu’au 31 décembre 2025, vous pouvez utiliser à la fois des factures électroniques (moyennant l’accord du destinataire), et des factures papier", répond le SPF Finances.

"À partir du 1ᵉʳ janvier 2026, vous pourrez également, si vous le souhaitez, envoyer une version PDF ou papier de la facture à votre client, mais la facture électronique structurée sera à ce moment-là la seule facture légalement conforme."

10/ Y a-t-il des mesures de soutien?

Pour compenser les coûts que les indépendants et les PME pourraient avoir à supporter pour les adaptations techniques à réaliser, le fisc a prévu deux mesures de soutien.

Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, la déduction pour des investissements numériques est passée à 20%. Les logiciels de facturation électronique sont concernés par cette déduction.

Par ailleurs, pour les périodes imposables 2024 à 2027, les petites PME et les indépendants qui utilisent des formules d'abonnement peuvent appliquer une déduction de frais majorée de 120% pour les programmes de facturation.

"Le surcoût qui sera payé pour un abonnement logiciel existant en raison de la facturation électronique (préparation, envoi et réception de factures électroniques sous une forme structurée) est éligible à la déduction des frais majorée de 120%, à condition d’indiquer ce surcoût séparément sur la facture", précise le fisc.

11/ Y aura-t-il des sanctions pour les retardataires?

Actuellement, les sanctions qui seront appliquées à ceux qui ne seront pas prêts le 1ᵉʳ janvier 2026 sont encore inconnues. "Celles-ci seront déterminées dans l’arrêté royal qui sera publié d'ici mai ou juin", conclut le fisc.