Un mariage de raison
Naissance d’un champion européen.
Visionnaire pour les uns. Scandaleuse pour les autres. La fusion entre Alstom Transport et Siemens ne laisse personne indifférent. L’opération est avant tout une bonne nouvelle industrielle. Pour la branche belge d’Alstom, d’abord. Ce fleuron du groupe français s’arrime à un conglomérat solide. Sa spécialisation – la signalisation –, un marché de 15 milliards d’euros, est au cœur de la fusion. Il faudra, demain, en équiper les nouvelles lignes ferroviaires et moderniser les anciennes pour répondre à l’augmentation de la fréquence des trains.
Les firmes de transport chinoises prennent la place des européennes, en Asie, en Afrique et même en Europe.
L’opération est une bonne nouvelle pour l’Europe dont le marché ferroviaire est en pleine mutation. L’UE prévoit des investissements de 500 milliards d’euros de 2020 à 2030 pour terminer les grands réseaux. Il faudra répondre à ce défi. Mais la concurrence est rude. La Chine a donné à son géant du transport CRRC une ambition mondiale. Les firmes de transport chinoises prennent la place des européennes en Asie, en Afrique et même en Europe. Cette offensive préfigure un mouvement plus long: la renaissance de la Route de la Soie. Cette fusion, profondément européenne, est un mariage de raison. Elle résulte de la nouvelle entente entre la France et l’Allemagne.
Son annonce n’arrive pas par hasard quelques jours après la réélection d’Angela Merkel. La Chancelière s’était d’ailleurs assurée lors d’un conseil européen que le président Macron la soutiendrait. Mais l’opération ne séduit pas tout le monde. L’opposition française pousse à l’unisson des cris d’orfraie, la droite conspuant "le passage du TGV français sous bannière allemande", la gauche craignant un coût social. L’Etat français, c’est vrai, quitte le capital. Siemens, dix fois plus grand qu’Alstom, prend le contrôle de la nouvelle unité. C’est le prix de la création de cet "Airbus du train" capable de relever les défis du futur. Les sites français et allemands des deux groupes ont été sanctuarisés pendant au moins quatre ans. Mais qu’en sera-t-il des emplois dans les usines belges? C’est, pour la Belgique, la zone d’ombre de ce deal historique à laquelle il faudra veiller.
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